Pour l’avenir de Mayotte, l’Etat promet toujours plus d’inégalités
Alors que la colère gronde à Mayotte et que les revendications se font plus pressantes que ...
Dimanche 20 mai, la presse annonçait un énième naufrage de kwassa-kwassa à Mayotte. Empruntant un passage dangereux au sud de l’île, pour tenter d’échapper aux murs de radars que dresse la France dans le bras de mer d’une soixantaine de kilomètres entre Anjouan et Mayotte, la barque chargée de 43 personnes a chaviré sur un coup de vent puis s’est brisée.
Dimanche 20 mai, la presse annonçait un énième naufrage de kwassa-kwassa à Mayotte. Empruntant un passage dangereux au sud de l’île, pour tenter d’échapper aux murs de radars que dresse la France dans le bras de mer d’une soixantaine de kilomètres entre Anjouan et Mayotte, la barque chargée de 43 personnes a chaviré sur un coup de vent puis s’est brisée. 5 personnes sont mortes, 15 sont toujours portées disparues. La dépêche AFP a jugé bon de souligner que c’est un club de plongée qui a découvert les naufragés. Les lagons idylliques qui bordent Mayotte, 101ème département français, sont devenus le plus grand cimetière marin de l’océan indien. Depuis 1995 et l’instauration du « visa Balladur », on estime à plus de 7 000 le nombre de personnes ayant perdu la vie en tentant la traversée pour Mayotte.
Mais si ces chiffres effrayent, ils racontent peu la réalité de ces traversées entreprises pour la plupart par des personnes à qui est refusé le droit de vivre à Mayotte. Des personnes qui ont construit toute leur vie à Mayotte et qui sont expulsées manu militari vers Anjouan où ils n’ont rien. Ainsi, sur ce kwassa-kwassa qui a fait naufrage, se trouvait Chadia, une jeune maman de 20 ans arrivée à Mayotte à l’âge de 13 ans. Elle y a fait toute sa scolarité, a eu son bac, s’est mariée et a eu un enfant en novembre 2010. En décembre 2011 pourtant, elle a été expulsée à Anjouan qu’elle connaît à peine. Alors elle a déboursé 200 euros et pris ce kwassa en espérant revoir enfin son enfant dont elle a été séparée il y a cinq mois. Aujourd’hui, après avoir survécu toute la nuit dans l’eau, en assistant à la noyade de ses compagnons d’infortune, elle attend, enfermée dans l’innommable centre de rétention de Pamandzi. La préfecture de Mayotte n’a pas daigné examiner les pièces apportées par son mari, ni même recevoir la demande de surseoir de La Cimade. Ils sont cinq naufragés à y être encore enfermés dans l’attente d’une probable expulsion. Leurs proches n’ont pas eu le droit de les visiter. Car tous ou presque venaient comme Chadia retrouver de la famille, une vie interrompue par une expulsion arbitraire. Soudati espérait revoir son enfant dont il est séparé depuis son expulsion en 2010. Faika, 14 ans venait rejoindre son père etc.
Les hommes et les femmes qui meurent noyés à quelques encablures de Mayotte, meurent à cause d’une politique migratoire toujours plus répressive et inhumaine. C’est l’administration française, qui en refusant de leur délivrer des visas, en les expulsant aveuglement et précipitamment sans prendre le temps de comprendre leur situation, en dressant un mur de patrouilles et de radars au beau milieu d’un archipel, mu historiquement par des va et vient permanents de la population, provoque ces drames devenus trop nombreux et trop banals.
Retrouvez davantage de reportages et d’analyse sur la politique migratoire française en Outre-mer dans le prochain numéro de Causes Communes qui paraîtra début juillet et qui comprendra un cahier spécial sur Mayotte
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Auteur: Service communication