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Eurostat a publié des données relatives à l’application du règlement Dublin en 2019. Cette année est marquée par un nombre inédit de saisines et de transferts, en particulier avec l’Allemagne.
Les données publiées le 3 juin 2020 par Eurostat permettent de cartographier l’application du règlement par la France vers les Etats-membres. Il n’y a en revanche pas de données par préfectures, malgré des demandes de communication.
Le règlement « Dublin » prévoit les critères et les règles de procédure visant à déterminer parmi les États participants (UE, Royaume-uni, Islande, Liechtenstein, Norvège et Suisse) quel est l’État responsable de l’examen de la demande d’asile en fonction de critères familiaux, d’entrée et de séjour réguliers ou non, et demandes déjà enregistrées. Si un État considère qu’un autre est responsable, il lui adresse une requête de prise ou de reprise en charge (ci-après dénommée « saisine ») qu’il doit accepter ou refuser dans un délai variant de quinze jours à deux mois (le silence valant accord). L’État dispose, en cas d’accord, d’un délai de six mois pour transférer le demandeur d’asile de façon volontaire ou forcée (transferts), délai qui peut être prolongé, en cas de fuite, d’un an supplémentaire (transferts prolongés). Pour en savoir plus voire la page spéciale sur le règlement
En 2019, selon les dernières données publiées par le ministère de l’intérieur, 45 907 personnes (mineures compris) ont été enregistrées et se sont vues remettre une attestation portant la mention « procédure Dublin », qui indique la mise en oeuvre de cette procédure. A la fin de l’année 2019, 35 228 étaient encore en possession d’une même attestation soit 10 679 qui ont pu accéder la procédure OFPRA. En outre, le ministère décompte 1 038 nouvelles demandes d’asile classées dans cette catégorie (vraisemblablement des personnes qui reviennent après avoir été transférées). Au total 48 964 personnes ont été « dublinées » en 2019 soit 31% des demandes enregistrées dans l’année (premières demandes et réexamens).
Selon les statistiques d’Eurostat, 49 516 saisines d’un autre État ont été effectuées par la France en 2018 contre 45 358 en 2018.
Les procédures de reprises en charge représentent 73% des saisines. La majorité d’entre elles visent des demandeurs qui ont une demande en cours dans un autre État-membre. Les saisines des personnes ayant été rejetées dans un autre Etat constituent 12,4 % du total des saisines.
L’Italie est toujours le le premier pays saisi, avec 14 506 saisines contre 15 428 en 2018. 81% sont des reprises en charge alors que jusqu’en 2017, c’était une majorité de prises en charge qui était adressée à ce pays. L’Allemagne est deuxième avec 10 156 saisines (8 694 en 2018) dont 93% sont des reprises en charge et 19 % concernent des déboutés. Ce chiffre bat en brèche le discours du ministre de l’intérieur qui indique que la majorité des personnes dublinées en provenance d’Allemagne y sont rejetées. Troisième pays, l’Espagne avec 7 244 saisines contre 5 309 en 2018, dont 86,2% de prise en charge en raison d’un visa, d’une entrée irrégulière (à Ceuta et à Mellila) ou d’un séjour irrégulier. L’Autriche et la Suède suivent avec des effectifs inférieurs ( respectivement 2 232 et 1 712 saisines contre 1 805 et 1 807 en 2018).
Saisines effectuées par la France en 2019 source Eurostat (cliquer sur le lien pour carte dynamique)
30 263 réponses favorables ont été obtenues ( 29 259 en 2018, 29 713 en 2017) sur 45 458 décisions, soit 66% . Pour certains pays, le taux de refus est anormalement élevé comme pour la Hongrie (93%) ou la Bulgarie (71,2%). Cela illustre la méthode des préfectures de saisir tous les Etats où un relevé Eurodac a été trouvé alors que le règlement prévoit normalement la détermination préalable d’un seul Etat. L’ordre des Etats-membres n’est pas modifié.
Décisions prises par les Etats-membres saisis par la France en 2019
5 312 transferts ont été effectués contre 3 533 en 2018, 2 633 en 2017 et 1 293 transferts en 2016. Cela représente 16,7% des accords et 10,7% des saisines. 4 590 (86 % du total) ont été effectués dans un délai d’un à six mois après la réponse.
L’année 2019 est marquée par la forte augmentation des transferts vers l’Allemagne qui redevient le premier pays de transfert avec 1 662 transferts (le nombre de 2 022 apparaît dans les données publiées par le BAMF) soit 112 % d’augmentation par rapport à 2019 et 31 % des accords. Il semble qu’un accord bilatéral a contribué à cette forte hausse. En revanche, le nombre de transferts diminue légèrement vers l’Italie ( 1 573 contre 1 647 transferts en 2018 (soit 15% des accords), suivie de l’Espagne avec une forte hausse (949 contre 262 en 2018 et 15,6% des accords)
Transferts effectués à partir de la France en 2019 source Eurostat
Le nombre de transferts en attente est de 6 972 soit près du tiers de celui de 2018. L’expiration du délai de transfert est la principale raison qui conduit la France à se déclarer responsable avec 9 059 décisions (ce qui ne correspond aux statistiques du ministère des requalifications des demandes enregistrées en 2019). L’Italie et l’Espagne sont les premiers pays concernés. L’application de la clause discrétionnaire ou les procédures Dublin interrompues car la France est responsable de l’examen représente 4 321 demandes.
Décisions unilatérales de responsabilité par la France
A l’inverse, des 2 666 personnes ont été transférées vers la France (on parle de transferts entrants). En 2018, il était au nombre de 1 405 contre 1 837 en 2018 en provenance d’Allemagne, du Benelux, de Suisse, d’Autriche et de Suède.
Transferts entrants vers la France en 2019
En Europe, l’Allemagne et la France sont les deux pays qui effectuent le plus de transferts sortants : 8 423 pour l’Allemagne et 5 312 pour la France mais l’Allemagne reçoit davantage de transferts entrants que la France, ce qui fait que le solde sortants/entrants est meilleur pour la France. La Grèce a également un grand nombre de transferts. A l’inverse, l’Italie qui transfère 228 personnes et en reçoit 5 864 est la perdante du dispositif.
Auteur: Responsable national Asile
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