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Placé en rétention au CRA de La Réunion, Monsieur S. a dû faire face à de multiples violations de ses droits sans pouvoir valablement le faire valoir devant les juridictions. Transféré puis maintenu illégalement dans un sous-sol de l’aéroport pendant plusieurs jours et sans contrôle du juge des libertés et de la détention, il a finalement été expulsé du territoire. La Cimade dénonce ces pratiques, qui s’inscrivent hors de tout cadre légal, et les graves conséquences qu’elles entrainent sur les droits des personnes retenues.
Le 26 janvier 2022, Monsieur S. est placé en rétention au CRA de La Réunion dès sa levée d’écrou en vue de son expulsion du territoire.
Cependant Monsieur ayant contracté la Covid-19 lorsqu’il était encore en prison, il lui est annoncé qu’il ne pourra pas être expulsé avant 10 jours et qu’il sera donc en isolement jusqu’à ce qu’il soit testé négatif.
Au CRA monsieur ne peut voir que La Cimade, il est coupé du reste du monde et n’a pas même accès à un téléphone alors qu’il est placé en isolement et donc sans droit de visite.
En effet, au CRA de la Réunion il n’y a pas de médiateur de l’OFII. Le CRA étant tout petit (6 places) et utilisé à faible fréquence, personne n’a été recruté pour ce poste, et ce qu’importe que cela nuise gravement aux droits des personnes retenues. L’examen du registre de l’OFII présent au CRA laisse apparaitre qu’aucun médiateur ne s’y est déplacé depuis décembre 2020. Or, le médiateur de l’OFII a la charge d’offrir des actions d’accueil, d’information, de soutien moral et psychologique ainsi qu’une aide à la préparation du départ. Il a également pour mission, plus pratique mais tout aussi essentielle, de permettre à la personne retenue d’acheter des cigarettes ou encore une carte téléphonique afin d’utiliser la cabine à disposition dans le CRA.
Lors de son audience de prolongation, Monsieur n’y est pas conduit en raison de sa positivité a la Covid, il aura uniquement l’occasion de s’entretenir quelques minutes avec son avocate commise d’office puis avec la Juge, le tout par téléphone depuis le CRA. Il fait valoir l’absence de l’OFII et son impossibilité d’accéder à ses droits mais est tout de même prolongé.
Il décide alors d’interjeter appel. L’ordonnance de la JLD étant tombé un vendredi soir, Monsieur avait donc jusqu’à lundi soir pour faire appel, le délai de 24h étant prorogé au premier jour ouvré suivant s’il se termine un samedi, dimanche ou un jour férié. Il fait parvenir sa requête à la Cour d’appel le lundi en fin de journée, dans les délais.
Pourtant, la Cour d’appel de La Réunion rend une ordonnance d’irrecevabilité, sans tenir compte de la prorogation, pourtant prévue par la loi, des délais les weekends et jours fériés. Tout espoir de faire reconnaitre ses droits s’évanouit soudainement pour Monsieur S.
Quelques jours plus tard, le mercredi 2 février, le cyclone Batsiraï s’approchant de l’île et l’alerte rouge n’étant plus qu’a quelques heures, la PAF décide en toute illégalité d’extraire Monsieur du CRA et de l’amener à l’aéroport, lieu où se trouve leurs locaux, afin de le placer le temps du cyclone au sous-sol dans les locaux de la zone d’attente. Ceci en contradiction avec tous les textes et réglementations en vigueur encadrant la rétention des personnes étrangères.
Monsieur saisi la Juge des Libertés et de la Détention le lendemain afin de demander sa libération après cette grave irrégularité. Si le CRA ne permet pas de garder Monsieur le temps de l’alerte rouge cyclonique, il doit être libéré et ne peut être maintenu en rétention dans des locaux non affecté à celle-ci.
Toutefois, la requête de Monsieur S. restera en attente pendant 5 jours, le tribunal judiciaire étant resté fermé pendant cette même durée. Le Juge des libertés et de la Détention, gardien de la liberté individuelle et en charge du contrôle des décisions de privation de liberté, dispose en principe d’un délai de 48h pour statuer, et était pourtant indisponible pendant 5 jours.
Le 7 février, La Cimade apprendra l’expulsion de Monsieur S. pendant le week-end, les vols internationaux ayant repris bien plus vite que l’activité des tribunaux.
Monsieur S. n’aura pu faire valoir ses droits pendant toute la période de sa rétention !
Auteur: Région Outre-Mer