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Conditions matérielles d’accueil : un recours urgent pour contester les refus et cessations de l’OFII

26 août 2024

Depuis le 17 juillet 2024,  les décisions de l’OFII refusant ou mettant fin aux conditions matérielles d’accueil sont contestables, dans un délai de sept jours. Explication. 

La loi du 26 janvier 2024 a créé l’article l’article L. 555-1 du CESEDA  qui prévoit que : « Les décisions qui refusent, totalement ou partiellement, au demandeur d’asile le bénéfice des conditions matérielles d’accueil ou qui y mettent fin, totalement ou partiellement, peuvent être contestées devant le tribunal administratif selon la procédure prévue à l’article L. 921-1. »

Quinze ans après sa création par le juge des référés du Conseil d’Etat, un recours en annulation, sur lequel un juge unique statue en urgence est donc créé et est entré en vigueur pour les décisions prises à compter du 15 juillet 2024. Attention les tribunaux considèrent que ce recours exclut la possibilité de déposer un référé suspension ou un référé-liberté

Quelles en sont les modalités?

  • Délai de recours  : Le recours doit être adressé à la juridiction compétente (celle dont dépend la direction territoriale de l’OFII) dans un délai de sept jours, à compter de la notification de la décision. Il s’agit d’un délai franc, c’est à dire que le délai commence à courir le lendemain à 0 heures et court jusqu’à 23H59 du septième jour sauf s’il s’agit d’un samedi, dimanche et jours fériés. Exemples : une décision de l’OFII  est notifiée le lundi 29 juillet 2024 à 9h40. Le délai commence à courir le mardi 30 juillet à 0H et le recours doit être formé avant le lundi 5 à 23h59.  Une autre décision est prononcée le vendredi 2 août 2024. le délai commence à courir le samedi 3 à 0H et le recours doit être formulé avant le lundi 12 23H59, puisque le délai se termine un jour non ouvrable.

Le délai de recours n’est pas susceptible de prorogation par un recours administratif qui, il y a peu, était pourtant obligatoire pour les refus des conditions matérielles d’accueil et qui a été supprimé par le décret du 5 juillet 2024.  On peut donc saisir directement le juge administratif dans tous les cas.

Quelles sont les décisions de l’OFII  concernées?

Le législateur a d’abord pensé aux décisions prises par l’OFII sur le fondement des articles L.551-15 et L.551-16 du CESEDA, dont la rédaction a été modifiée par la loi du 26 janvier 2024.

 A. Les refus immédiats (article L. 551-15 CESEDA)

Les conditions matérielles d’accueil sont refusées, totalement ou partiellement, au demandeur, dans le respect de l’article 20 de la directive 2013/33/ UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant des normes pour l’accueil des personnes demandant la protection internationale, dans les cas suivants :

  1. le refus de l’orientation régionale ou d’hébergement.

La loi prévoit que l’OFII  propose une offre des conditions matérielles d’accueil   et informe des situations où le bénéfice peut en être refusé ou retiré. Il  peut orienter vers une région ou un lieu d’hébergement  notamment dans le cadre du schéma national d’accueil. Si la personne refuse l’offre  de s’y rendre ou ne la ou le rejoint pas, l’OFII doit refuser par une décision motivée le bénéfice, après  examen individuel. Ce refus peut être pris immédiatement lors du passage au guichet unique (notamment lorsqu’une personne demandant asile en Ile-de-France ne souhaite pas être orientée vers une autre région) ou plusieurs semaines après, si la personne refuse de se rendre dans un lieu d’hébergement (cf. CE, 11 décembre 2023, n°467151)

  1. Les demandes dites tardives ou de réexamens.

Lorsque la personne présente une demande d’asile plus de 90 jours après son arrivée irrégulière (60 en Guyane), ou a formulé une demande réexamen, l’OFII doit refuser le bénéfice des conditions matérielles d’accueil, sous réserve d’un examen de situation individuelle. Pour le calcul du délai de 90 jours, la date de départ est celle de la présentation de la demande à la structure de pré-acccueil des demandeurs d’asile, voire de l’appel à la plateforme téléphonique de l’OFII en Ile de France.  Désormais, est considérée comme une demande de réexamen, la demande formulée au nom d’un mineur qui est né e après la décision définitive de rejet de celle-ci. La décision est prise immédiatement.

B  Cessation  totale ou partielle  (art. L551-16 CESEDA)

L’OFII met fin  totalement ou partiellement les conditions d’accueil dans les cas suivants :

  1. l’abandon de la région ou du lieu d’hébergement

Si la personne qui a acceptée d’être orientée vers une autre région ou dans un lieu d’hébergement le quitte plus de sept jours, elle l’a abandonné et peut faire l’objet d’une procédure de cessation  et la personne ne peut pas accéder à un centre d’hébergement généraliste autre que d’urgence, ni faire valoir son droit à l’hébergement opposable (article L. 552-11 du CESEDA).

2.L’absence aux convocations des autorités

La loi prévoit que si une personne ne se présente pas aux convocations des autorités, elle peut se voir retirer les conditions d’accueil. C’est notamment le cas si la personne dublinée prend la fuite, constat fait par le préfet ou si elle est de retour après un transfert, l’OFII considérant qu’elle ne s’est pas présentée aux convocations de l’Etat membre responsable.

 3. L’absence de réponse aux demandes d’information de l’OFII

La loi prévoit l’obligation de retirer les conditions d’accueil en cas de non réponse aux demandes d’information de l’OFII (notamment sur l’hébergement et sur l’attestation).

4.Les informations mensongères sur les revenus, sur la composition familiale ou la demande sous plusieurs identités (identifiées à une manoeuvre frauduleuse)

Le décret prévoit alors la restitution des sommes trop perçues.

La décision de cessation est motivée après que la personne a pu présenter des observations préalables. Selon le décret du 5 juillet 2024, les décisions de cessation doivent être exceptionnelles dans les trois premiers cas (article D. 551-18 CESEDA).

La loi prévoit la possibilité de demander le rétablissement des conditions matérielles d’accueil (notamment en cas de sortie de fuite dans le cadre de la procédure Dublin. Les décisions refusant ce rétablissement sont logiquement contestables par ce recours.

Sur ce type de décisions motivées et contestées devant les juridictions depuis près de quinze ans, il y a une jurisprudence abondante qui peut être consultée dans ce recueil .

Un recours pour d’autres types de décisions de l’OFII ?

Si les décisions de refus et de cessation  décrites plus haut, relèvent  indiscutablement  du champ de ce nouveau recours, d’autres décisions de l’OFII pourraient en relever car pouvant s’analyser comme des refus ou cessations partiels des conditions matérielles d’accueil :

  • les décisions de fin des conditions matérielles d’accueil prévues à l‘article L.551-14, lorsque la personne ne dispose pas du droit de se maintenir sur le territoire, pendant l’examen d’un recours à la CNDA mais n’a pas fait l’objet d’une obligation de quitter le territoire ou d’une décision de remise (demandeurs originaires d’un pays considérés comme surs, demandeurs ayant fait l’objet d’une décision d’irrecevabilité en raison d’une protection conventionnelle, subsidiaire ou équivalente dans un autre Etat-membre ou un Etat-tiers);
  • le contentieux du versement de l’allocation forfaitaire  et de son montant. Des personnes se voient couper le versement de l’allocation, sans raison, ou  le montant versé ne prend pas en compte l’ensemble des membres du ménage ou des dates d’enregistrement;
  • le non-versement du  montant additionnel de l’allocation pour demandeur d’asile : l’offre de prise en charge prévu par l’article L.551-9 du CESEDA comprend un hébergement et le versement de l’allocation. Quand l’hébergement n’est pas fourni, l’OFII verse un montant additionnel de 7,4 euros par jour et par adulte (4,7 euros en Guyane) pour permettre à la personne de se loger. Toutefois, si la personne est hébergée à titre gratuit de quelque manière que ce soit, l’OFII est en droit de le retirer du calcul (article D. 553-13 du Ceseda).  C’est de plus en plus le cas et sur la base des déclarations de la personne lors de l’enregistrement de la demande dans les guichets uniques alors que cet hébergement  peut s’avérer être très précaire. Lorsque l’OFII estime qu’il y a des déclarations mensongères quant au domicile et aux modalités d’hébergement, il y a une procédure préalable d’observations pour retirer ce montant;
  • les litiges relatifs à l’orientation vers un hébergement dans le dispositif national d’accueil qui furent historiquement les premiers mais sont tombés en désuétude. Si une personne ne se voit pas proposer un hébergement  par l’OFII et qu’elle ne perçoit pas le montant additionnel car elle est hébergée dans le dispositif d’hébergement d’urgence, on peut considérer qu’il s’agit d’un refus partiel du bénéfice des conditions matérielles d’accueil et  donc demander l’annulation de cette décision avec une injonction à l’OFII de désigner un lieu susceptible de l’héberger de façon pérenne;
  • les décisions relatives aux sanctions pour non respect du règlement intérieur d’un hébergement. Depuis 2021, un décret doit être pris pour les définir, ce qui n’a toujours pas été fait. Toutefois ce motif est utilisé par les préfets pour demander l’évacuation des lieux d’hébergement asile des demandeurs d’asile. Si les personnes ainsi sorties se voient priver d’un autre  hébergement ou du versement total ou partiel de l’allocation, elles peuvent contester ce refus.

Contrairement aux décisions prises sur le fondement des articles L.551-15 et suivants, ces décisions sont le plus souvent implicites et peuvent donc être contestées à tout moment.

 

 

 

Auteur: Responsable national Asile

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