Réaffirmons notre rôle de vigie, défendons nos libertés
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Le déluge de bombes et de feu s’est arrêté sur Gaza. Les explosions de roquettes ne s’entendent plus dans le sud d’Israël. Les Palestiniens comptent leurs morts, le monde entier peut constater l’étendue du désastre. Rien n’est réglé. Tout peut recommencer.
Le terme de victoire entendu dans l’un et l’autre camp résonne comme une indécence : seules la haine, la souffrance et la mort ont gagné. Et les forces qui les propagent ont encore un bel avenir devant elles si il n’y a pas une véritable mobilisation internationale et au sein des peuples palestiniens et israéliens pour dire non à toutes ces folies meurtrières et pour appeler à la mise en œuvre d’un véritable processus de négociations conduisant à l’établissement des conditions pour une paix juste et durable dans la région.
En Palestine et en Israël, les voix courageuses capables de revendiquer une rupture radicale par rapport aux politiques menées jusqu’à présent sont encore très minoritaires et très peu audibles, quand elles ne sont pas directement menacées par les fanatiques des deux côtés. Mais elles existent, et elles seules sont porteuses d’espoir. C’est vers elles que la Cimade se tourne en priorité, pour se faire l’écho de leurs revendications, pour exprimer une solidarité active avec leurs initiatives concrètes. C’est autour d’elles que nous appelons nos amis chrétiens, juifs et musulmans à rassembler leurs voix et leurs énergies, pour faire entendre d’autres perspectives venues du cœur même du conflit qui parlent de respect mutuel, de coexistence et de coopération .
En s’engageant dans cette voie, avec une détermination accrue dans le contexte de crise actuel, la Cimade reste sur la ligne de crête étroite et inconfortable sur laquelle elle a cheminé depuis sa création, concernant la recherche d’une paix dans la justice pour les deux peuples qui ont le droit de vivre dans la dignité et la sécurité sur cette terre saturée de mémoires et d’histoire.
À partir de l’engagement fondateur de son histoire qui fut de dénoncer la persécution des juifs par le régime nazi et d’entreprendre des actions concrètes pour sauver des vies menacées, la Cimade s’est toujours prononcée contre toutes les politiques nationales ou internationales visant à écraser le droit des peuples à vivre dans la dignité et la liberté. Elle s’est clairement située aux côtés des opprimés et des humiliés en lutte pour leur libération, qu’il s’agisse du colonialisme, de l’apartheid ou des dictatures militaires. Qu’il s’agisse aussi des politiques d’occupation, d’oppression et d’humiliation menées par les gouvernements israéliens successifs en violation du Droit International à l’encontre du peuple palestinien.
Le bilan, dont personne n’a encore mesuré le véritable coût humain, politique et économique, du déchaînement de violences autour de Gaza, montre à quel point c’est folie de parler de «guerre juste».
Comment ne pas être atterrés d’apprendre que l’armée d’Israël a bombardé des hôpitaux, des centres de réfugiés, des écoles, en utilisant au surplus des bombes au phosphore, et que l’on dit que 90 % des israéliens soutiendraient ces actions en violation flagrante du droit humanitaire ? Comment accepter les arguments de légitime défense devant une telle asymétrie des forces en présence ?
Comment ne pas être scandalisés de constater le manque de volonté et de fermeté de la communauté internationale pour faire respecter le Droit International et pour convaincre/contraindre l’État d’Israël à se conformer, comme tout autre état membre des Nations Unies, aux décisions prises par les instances légitimes de la communauté des nations ? Comment faire admettre à une large partie de l’opinion publique israélienne et à ceux qui à l’extérieur soutiennent sans critique toute action menée par les gouvernements israéliens que c’est précisément parce que l’on reconnaît – et que l’on défend – le droit d’Israël à exister en tant qu’État à part entière dans le concert des nations que l’on est en droit de réclamer qu’il respecte les mêmes devoirs que les autres ?
Comment ne pas être bouleversés par la propagation du virus mortel de la haine dans la société palestinienne comme dans la société israélienne qui semble, entre autres, paralyser toute capacité d’analyse rationnelle des causes et des conséquences des actions menées et activer au contraire les fanatismes les plus irrationnels, allant du projet de la destruction de l’État d’Israël pour les uns, à celui du nettoyage ethnique ou de la soumission totale des palestiniens pour les autres ?
Pour aider les deux peuples à sortir de cette impasse meurtrière, de ce cauchemar qui n’en finit pas, il faut à tout prix sortir du stade des dénonciations haineuses et des justifications aveugles par chaque camp des violences commises contre «les autres».
Il faut de toute urgence que des acteurs responsables des deux côtés du conflit redonnent vie à des processus de négociation, basés sur un certain nombre de principes et de valeurs, et qui aillent bien au-delà de la gestion de cessez-le feu qui ne font que geler des positions acquises par la force qui sont intenables à terme parce qu’insoutenables sur le plan du droit et de la morale.
Dans la ligne de son histoire marquée par une double solidarité avec les peuples israéliens et palestiniens, et conformément aux positions prises en particulier par le Conseil Œcuménique depuis 1948, la Cimade réaffirme aujourd’hui :
Dans le contexte actuel de tensions et de blocage, de fortes pressions et des mesures concrètes d’accompagnement doivent venir de l’Europe, de la nouvelle administration américaine, des Nations Unies pour amener des partenaires, antagonistes pour le moment mais incontournables, à s’engager dans de telles négociations. Les meilleures chances pour qu’elles puissent aboutir reposent, non pas sur un énième plan de paix concocté par des chancelleries occidentales, mais sur une mobilisation de plus en plus forte des femmes et des hommes qui n’en peuvent plus de la situation de guerre, qui souhaitent la paix en Palestine et en Israël , qui croient qu’elle est encore possible, qui pensent qu’elle est même la seule issue possible pour continuer à vivre sur cette terre, côte à côte, dans la reconnaissance et le respect mutuel.
Encore faut-il un projet crédible et susceptible de faire bouger les consciences. Le travail accompli par les négociateurs des «accords de Genève» au début des années 2000 pourrait utilement être ressorti des cartons car il abordait un grand nombre de ces questions épineuses.
Ce ne sont pas les projets qui manquent, mais bien la volonté politique de faire aboutir des négociations, qui intègreront à coup sûr des compromis, pour donner – enfin- une chance à la paix.
C’est avec ces hommes et à ces femmes de courage et de conviction que la Cimade souhaite s’engager d’avantage en leur apportant l’expression d’une solidarité active. Cet engagement, partagé avec d’autres partenaires associatifs, se traduira aussi par des actions de plaidoyer auprès des autorités françaises et européennes afin que le chemin de la paix ne soient plus seulement pavé de bonnes intentions mais aussi de mesures concrètes et conséquentes.
Adopté à l’unanimité par le Conseil de la Cimade le 24 janvier 2009
Auteur: Service communication
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