PAU : LA CIMADE ET SES PARTENAIRES DENONCENT LES CONDITIONS D’ACCUEIL INDIGNES DES PERSONNES EN DEMANDE D’ASILE
LES PRAHDA (programmes régionaux d'accueil et d'hébergement des demandeurs d'asile) font partie ...
Aux frontières extérieures de l’Europe comme sur le territoire européen et aux frontières nationales françaises, la crise sanitaire révèle l’urgence de la mise en œuvre de mesures de protection pour tou.te.s.
La Commission européenne a publié le 16 mars « des lignes directrices aux États membres sur les mesures de gestion des frontières relatives à la santé dans le cadre de la situation d’urgence liée au COVID-19 ».
Aux frontières extérieures, celles-ci prévoient notamment la fermeture temporaire de l’accès au territoire Schengen pour tou.te.s les ressortissant.e.s non européen.ne.s et non-résident.e.s de l’UE à l’exception de certaines catégories, telles que les professions de santé ou de la gestion des frontières.
Aux frontières intérieures, la Commission rappelle également aux Etats membres qu’ils ont la possibilité – en application des accords Schengen renégociés en 2013 – de réintroduire temporairement et de façon exceptionnelle les contrôles à leurs frontières nationales pour des questions de sécurité nationale ou de politique publique, incluant le risque de contagion dans les cas les plus critiques. Ce levier a déjà été utilisé à maintes reprises par plusieurs Etats membres. C’est ce que la France a mis en œuvre en 2015 au moment de la COP 21, temporairement puis plus durablement après les attentats, de même que cinq autres pays européens (l’Allemagne, l’Autriche, la Suède, la Norvège et le Danemark) en réaction à l’augmentation des arrivées de ressortissant·e·s non européen·ne·s par la Grèce en 2015. Cela fait quatre ans et demi que les contrôles ont été rétablis et sans cesse prolongés aux frontières nationales de ces six États. Dans le contexte actuel, le 2 avril 2020, la France a notifié à la Commission européenne sa décision de prolonger à nouveau les contrôles à ses frontières intérieures et ce, jusqu’au 30 octobre 2020.
En pratique, dans le contexte de la pandémie de coronavirus, bien que la Commission précise que les contrôles sanitaires aux frontières peuvent être opérés sans qu’il y ait un rétablissement des contrôles frontaliers, un grand nombre de pays ont fermé leur frontière externe au trafic aérien et les décisions de rétablissement des contrôles aux frontières internes se sont multipliées. Prises au fil des jours de façon unilatérale et très peu coordonnées depuis le début de la crise sanitaire, celles-ci ont révélé la mise à l’épreuve de l’espace Schengen dans la mise en œuvre d’une action européenne face à la crise sanitaire.
La Commission précise que les décisions de refus d’entrées susceptibles d’être prises dans ce contexte doivent être proportionnées et non discriminatoires et préconise que les personnes ressortissantes ou non de l’UE qui arrivent sur le territoire européen soient systématiquement contrôlées, incluant les contrôles sanitaires. Enfin, dans ses « orientations pratiques pour la mise en œuvre des mesures de restrictions temporaires des déplacements non essentiels à destination l’UE », elle précise que les refus d’entrée ne devraient pas s’appliquer aux personnes qui nécessitent une protection internationale ou humanitaire, en application du principe de non refoulement. En parallèle, Filippo Grandi, le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugié.e.s a appelé les Etats à ne pas fermer leurs frontières aux personnes qui recherchent une protection et à ne pas les refouler vers des situations qui pourraient les mettre en danger.
Dans les faits, aux frontières externes de l’Union européenne, les personnes exilées subissent des conditions sanitaires exécrables et font face à des situations de violences aggravées par les réponses sécuritaires au Covid19. Qu’en est-il de la situation des personnes exilées aux frontières nationales françaises ?
Alors que les ministres français ont ordonné aux préfets « la prise en charge et le soutien des populations précaires face à l’épidémie du Covid-19 » dans une instruction interministérielle du 27 mars, tout au long du littoral nord, les mesures de protection des personnes exilées ont tardé à être mises en œuvre et demeurent insuffisantes face à l’importance des besoins humanitaires, encore renforcés par l’épidémie Covid19.
A Grande Synthe, plus de 600 personnes exilées dont 50 familles avec enfants et des femmes enceintes, vivent dans des entrepôts désaffectés ou dans les bois dans des conditions indignes marquées par l’absence de douches et de toilettes, un accès limité à l’eau potable. A Calais, entre 800 et 1000 personnes (sur)vivent sur les différentes « jungles ». Loin d’être nouvelles, ces situations se sont aggravées avec la crise sanitaire. Dès le début et au fur et à mesure, plusieurs associations ont dû se retirer, entrainant des conséquences importantes pour l’accès aux besoins fondamentaux des personnes, notamment sur le volet alimentaire. En outre, les expulsions forcées des campements se sont poursuivies malgré le contexte d’épidémie et ce, alors même que les forces de police elles-mêmes se retiraient et demandaient l’arrêt des expulsions de campements quotidiennes. Des opérations de mise à l’abri, pour le moment sur la base du volontariat, ont finalement été initiées trois semaines après le début de la mise en œuvre du confinement de la population et après de multiples interpellations des associations mobilisées sur ces territoires (à partir du 3 avril à Calais et du 6 avril à Grande-Synthe). Si à Grande-Synthe des douches et WC sont en cours d’installation, comme cela existe déjà à Calais, les mesures proposées demeurent insuffisantes et des centaines de personnes vivent toujours des conditions dramatiques sans que leurs besoins fondamentaux ne soient satisfaits.
Le 7 mars 2020, des centaines de citoyen·ne·s, militant·e·s et professionnel·le·s de la montagne organisaient une grande maraude solidaire à Montgenèvre pour dénoncer les violations de droits des personnes exilées et rappeler la nécessité de poursuivre les maraudes afin de réduire les risques et préserver des vies.
Depuis, les maraudes organisées dans les zones montagneuses de la région du briançonnais ont été suspendues pour assurer la sécurité des maraudeurs.euses, de leurs proches ainsi que des personnes exilées tandis que la crise sanitaire a contraint les associations et militant.e.s qui intervenaient habituellement à la frontière entre Menton et Vintimille à suspendre leurs actions d’observations des pratiques des forces de l’ordre et de recueil de témoignages des personnes refoulées. Si les citoyen.ne.s et les organisations solidaires ne cessent d’adapter leurs actions afin de poursuivre – dans la mesure des possibles – leurs actions de solidarité (veille sanitaire, système d’auto-gestion pour limiter le nombre de bénévoles et mesures de prévention des risques dans les lieux d’accueil d’urgence, etc.), la situation des personnes exilées, exposées aux dangers des sentiers de montagne et aux risques de refoulements illégaux et/ou de renvois vers l’Italie, demeure inquiétante.
Avec l’arrêt des observations de la société civile dû au confinement, il est désormais difficile d’avoir un regard sur les pratiques à la frontière. Si les refoulements semblent avoir largement diminué ces derniers jours en raison probablement des déplacements difficiles en Italie, les informations disponibles révèlent que jusqu’au 26 mars au moins, des personnes continuaient d’être refoulées vers l’Italie depuis le poste de la police aux frontières de Menton avec également des pratiques de privation de liberté la nuit qui perduraient.
Aux frontières extérieures de l’Union européenne comme sur le territoire européen, à la crise de l’accueil s’ajoute une crise sanitaire. Les mesures de protection doivent être accessibles à toutes et tous et notamment aux personnes les plus fragiles, qu’elles soient étrangères ou non. Dans ce contexte, il est plus que jamais urgent de mettre à l’abri et de protéger les personnes exilées en situation de détresse aux frontières, d’assurer leur prise en charge sanitaire et de cesser toutes pratiques de privation de liberté comme de refoulements illégaux et/ou de renvois à la frontière, conformément aux recommandations du Haut-commissariat des Nations Unies pour les réfugiés et de l’Organisations mondiale de la santé.
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