Inlassablement, les préfectures de Guyane et de Guadeloupe continuent les expulsions vers Haïti
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C’est une petite victoire dont La Cimade n’est pas peu fière : le 8 mars dernier, le tribunal administratif de Cayenne a enjoint à la préfecture de Guyane de délivrer aux 5 personnes ayant déposé une requête devant le juge des référés des rendez-vous dans un délai d’un mois, avec une pénalité de 100€ par jour de retard.
Depuis mars 2020, les démarches administratives auprès de la préfecture de Guyane ont été complètement dématérialisées. Ainsi, toute demande de rendez-vous pour une première demande de titre de séjour ou pour un renouvellement doit se faire par internet, directement sur le site de la préfecture. Or les personnes étrangères ont été confrontées, comme dans de nombreux autres départements, à l’impossibilité de prendre un rendez-vous faute de plages horaires disponibles, malgré des tentatives répétées parfois plusieurs fois par jour. En conséquence de ce blocage administratif, les personnes étrangères se sont retrouvées privées de leurs droits à déposer une demande de titre de séjour, les condamnant à une situation instable, irrégulière et précaire.
Face à une demande croissante de ressortissants étrangers sollicitant La Cimade pour les aider à obtenir un rendez-vous, un contentieux a été engagé contre la préfecture en février 2021 via une procédure en référé et avec l’aide d’un avocat. Ce fut par exemple le cas de Mme G., arrivée en Guyane à l’âge de 5 mois et mère d’un enfant français, qui a déposé son dossier au guichet de la préfecture en juillet 2020 mais qui est restée sans nouvelles depuis, malgré des tentatives de prises de rendez-vous répétées et l’envoi de nombreux mails et courriers.
Comme pour les 4 autres requérant·e·s assisté·e·s par La Cimade, le tribunal administratif a jugé, face aux preuves de tentatives multiples et aux situations précaires engendrées, que la préfecture de Guyane devrait leur accorder un rendez-vous dans les plus brefs délais. En effet, il faut rappeler que de telles difficultés à prendre rendez-vous représentent une atteinte au principe d’égalité et de continuité du service public. En ne garantissant pas un accès au guichet pour le dépôt des demandes de titre de séjour, la préfecture viole nombre de dispositions du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA).
Concernant la dématérialisation, l’administration parle de mesures de « simplification », ou de « facilitation » mais chacun·e peut constater que cela rend souvent, au contraire, la moindre démarche plus compliquée. Cela exclut une grande partie du public, les plus démuni·e·s, les moins instruit·e·s, les plus isolé·e·s et tout simplement les nombreuses personnes n’ayant pas facilement accès à un ordinateur ou à une connexion internet. En revanche, le tribunal de Cayenne ne s’est pas encore prononcé sur la légalité d’une telle pratique de dématérialisation, pourtant déjà condamnée par le Conseil d’État en 2019 qui avait clairement énoncé que cette procédure ne pouvait être imposée aux usagers et usagères du service public.
Ainsi, nous espérons qu’à l’avenir la justice guyanaise se prononcera dans le même sens que le tribunal administratif de Rouen qui a reconnu récemment que la loi n’autorisait pas actuellement la dématérialisation des démarches menées en vue de l’obtention d’un titre de séjour, et que le Conseil d’Etat qui a affirmé que des alternatives à la dématérialisation doivent toujours être maintenues. Faute de quoi, les modules de prise de rendez-vous par internet pour demander un titre de séjour et les modules de dépôt en ligne des demandes sont entachés d’illégalité.
En attendant, La Cimade demande au préfet de Guyane de prendre acte des décisions rendues par le pouvoir judiciaire afin de les étendre à l’ensemble des usagers et usagères, de garantir à tou·te·s l’accès au service public et de faire cesser toute entrave à la loi.
Pour aller plus loin : Dématérialisation des demandes de titres de séjour : de quoi parle-t-on ?
Auteur: Région Outre-Mer
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