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C’est un jugement qui fera date : le 18 février 2021, le tribunal administratif de Rouen a donné raison aux associations en annulant pour illégalité un arrêté de la préfecture de Seine-Maritime, qui imposait aux personnes étrangères de déposer en ligne leurs demandes de titre de séjour. La motivation retenue par le tribunal s’applique en fait à toute préfecture imposant la dématérialisation.
La dématérialisation ne peut être imposée aux usagers et usagères du service public : le Conseil d’Etat l’avait affirmé sans ambiguïté dans une décision du 27 novembre 2019. Mais un grand nombre de préfectures, à l’instar de la Seine-Maritime, ont choisi de tout simplement ignorer cette jurisprudence.
En Seine-Maritime comme ailleurs, les personnes étrangères qui demandent un titre de séjour sont confrontées à une profonde maltraitance institutionnelle : refus d’instruction des dossiers, conditions de régularisation ubuesques et, depuis le mois de mars 2020, dématérialisation de la plupart de leurs démarches administratives. En pratique, cette dématérialisation imposée a avant tout pour effet de priver les personnes de leurs droits en les gardant à distance de l’administration.
Le jugement rendu par le tribunal administratif de Rouen est, en France, le premier coup d’arrêt directement porté à une préfecture en matière de dématérialisation des demandes de titre de séjour. Le tribunal retient en effet que la réglementation n’autorise aucune dématérialisation des démarches menées en vue de l’obtention d’un titre de séjour :
Les dispositions du Ceseda « font obstacle à ce que le préfet (…) prescrive que le dépôt des demandes de titre de séjour concernés soit effectué par tout autre procédé et notamment numérique » et de manière plus générale, « les démarches en matière de demandes de titre de séjour ont été exclues du champ d’application de la mise en œuvre des téléservices ».
Par cette décision, le tribunal administratif de Rouen sanctionne la préfecture de Seine-Maritime. Et bien au-delà, il affirme qu’aucune démarche dématérialisée ne peut aujourd’hui être imposée, ni même proposée, en matière de droit au séjour. Aux termes de cette décision, c’est bien l’ensemble des modules de prise de rendez-vous par Internet pour demander un titre de séjour et l’ensemble des modules de dépôt en ligne des demandes, qui sont entachés d’illégalité.
Les organisations requérantes (La Cimade, le Gisti, la Ligue des droits de l’Homme et le Syndicat des avocats de France) et les organisations locales de soutien aux personnes étrangères se félicitent de cette décision essentielle et appellent les pouvoirs publics à cesser, partout en France, d’imposer la dématérialisation des démarches administratives, notamment pour les personnes étrangères. Un accueil physique doit toujours être maintenu et les préfectures doivent être dotées de moyens suffisants pour répondre aux besoins des usagers et usagères.
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