Quoi qu’il en coûte… pour leur vie
Depuis le début de l’année 2024, les tentatives d’expulsion de personnes originaires de pays ...
Tous les lycéens majeurs doivent obtenir avant la rentrée scolaire un rendez-vous à la préfecture ainsi que les titres de séjour nécessaires à leur insertion sociale et professionnelle en France.
Tribune parue dans Libération co-signée par la Cimade IDF, rédigée par un collectif de personnels de l’Education Nationale du 93, soutenue par près de 776 personnes issues de 94 collèges et lycées de Seine-Saint-Denis
Photo : rassemblement préfecture de Bobigny le 09.10.19 ©La Cimade
Nous, personnels de l’Education nationale de Seine-Saint-Denis, sommes engagé·e·s dans un seul objectif : aider nos élèves à progresser, à définir leur projet d’étude et à le mener à bien. Cette tâche n’est pas facile tant les obstacles qui se dressent devant les jeunes de notre département sont nombreux. Cette année en particulier, ils ont dû faire preuve d’une grande abnégation pour continuer à travailler et, en terminale, à se préparer aux exigences de l’enseignement supérieur ou de l’insertion professionnelle.
Mais une partie de nos efforts pour les assister dans leur parcours est en passe d’être réduite à néant, en ce qui concerne certains d’entre eux. Pas pour des raisons de niveau ou de motivation, mais simplement parce que la préfecture leur refuse des papiers et met un coup d’arrêt brutal, injuste, insupportable, à leur parcours de réussite.
Ces élèves de nationalité étrangère sont arrivés en France depuis plusieurs années, seuls ou avec leur famille. Ils y ont accompli une partie de leur scolarité et comme n’importe quel autre élève, sont membres à part entière de la communauté scolaire. Cependant, le jour de leurs 18 ans, ils sont devenus jeunes majeurs et peuvent désormais, en vertu de la loi actuelle, être expulsés à tout moment du territoire français s’ils n’ont pas engagé la régularisation de leur situation.
Or cette régularisation est en pratique devenue impossible dans notre département, ce qui, de facto, les place dans une situation d’illégalité anxiogène. Comment étudier avec la peur de se voir arrêté sur le chemin du lycée comme c’est arrivé cette année à l’un de nos élèves ? Depuis deux ans maintenant, la préfecture de Seine-Saint-Denis a imposé des prises de rendez-vous dématérialisées pour toute démarche d’obtention d’un titre de séjour. Et depuis deux ans, le site est constamment saturé : impossible d’obtenir un rendez-vous pour voir sa situation examinée. Certains ont commencé leurs démarches il y a plus d’un an, sans aucune réponse de la préfecture.
Le silence de l’administration
Ces élèves se voient entravés dans la régularisation de leur situation et leurs perspectives d’avenir par la pire des réponses qui soit : le silence de l’administration. En Seine-Saint-Denis, ils sont plusieurs centaines, sans doute des milliers, à se retrouver ainsi bloqués dans leur parcours et forcés d’entrer dans l’illégalité par une administration aveugle. Nous ne comptons plus les cas d’élèves à qui des formations avaient ouvert leur porte, mais qui devront y renoncer, faute d’avoir pu obtenir la régularisation de leur situation administrative.
Nous refusons de les voir subir cette injustice sans réagir. Nous refusons que ces milliers de lycéens, bientôt diplômés et futurs professionnels, qui ont parfois traversé des épreuves qu’aucun d’entre nous ne saurait imaginer, soient ainsi purement et simplement privés de leur droit à poursuivre leur formation – droit inscrit dans notre histoire et notre Constitution.
Nous, personnels de l’Education nationale de Seine-Saint-Denis, n’acceptons pas qu’un seul de ces adolescents soit obligé de mettre brutalement fin à son parcours de formation parce que la préfecture ne l’a pas reçu à temps. Nous exigeons que tous les jeunes majeurs puissent obtenir un rendez-vous à la préfecture avant la rentrée scolaire de septembre, pour obtenir les titres de séjour nécessaires à la poursuite de leur vie en France et à leur insertion sociale et professionnelle.
Au-delà de la situation d’urgence, nous demandons que l’école redevienne pour tous nos élèves sans papiers un sanctuaire qui les arrache momentanément aux épreuves qu’ils ont pu vivre. Nous, personnels de l’Education nationale de Seine-Saint-Denis, demandons donc que le principe d’un droit à étudier leur soit reconnu et qu’il leur soit ainsi donné la possibilité d’un avenir.
Premiers signataires : Aurélie Despériez, professeure documentaliste, lycée professionnel Arthur Rimbaud, La Courneuve, Guillaume Hoibian, enseignant d’histoire-géographie, lycée général Flora-Tristan, Noisy-Le-Grand, Julie Mandelbaum, enseignante de français-histoire, lycée professionnel Jean-Moulin, Rosny-Sous-Bois, Alice Mauricette, enseignante d’espagnol, lycée polyvalent Auguste-Blanqui, Saint-Ouen, Emma Scholler, conseillère principale d’éducation, lycée général et professionnel du bâtiment Claude-Nicolas-Ledoux, Pavillons-Sous-Bois, Cécile Veillard, enseignante de philosophie, lycée polyvalent Auguste-Blanqui, Saint-Ouen, Emmanuel Zemmour, enseignant de sciences économiques et sociales, lycée général et professionnel du bâtiment Claude-Nicolas-Ledoux, Pavillons-Sous-Bois… La liste des autres signataires est consultable ici. 776 personnels de l’Éducation Nationale exerçant dans 94 lycées et collèges de Seine Saint Denis.
Les organisations signataires: la SU 93, la CGT Educ’action 93, Solidaires 93, le Snes 93, le Snep 93, l’UNL, la Cimade Ile-de-France, la LDH 93, le GFEN, Asti 93, ADJIE, Asmie, les Francas 93, la Fédération des Centres sociaux 93, le Mrap 93.
Un collectif de personnels de l’Education nationale du 93
Auteur: Admin_Ile_de_France
Depuis le début de l’année 2024, les tentatives d’expulsion de personnes originaires de pays ...
Le festival Migrant’Scène commence le jeudi 9 novembre 2024 en Île-de-France et vous propose ...
Au moins trois personnes bénéficiant du statut de réfugié ont été enfermées à l’été 2024 au ...
A la fin de l'année scolaire 2023, l'équipe sensibilisation d'Ile-de-France a monté un projet ...