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« Être vigilant pour décrypter l’endroit où il faut s’engager parce que le monde est en train de déraper»

5 mars 2013

La Cimade salue la mémoire de Stéphane Hessel. Entretien avec Jacques Maury, président d’honneur de La Cimade.

La Cimade salue la mémoire de Stéphane Hessel. Entretien avec Jacques Maury, président d’honneur de La Cimade. 

  • Quand avez vous rencontré Stéphane Hessel?

D’abord je dois vous dire que je n’ai vraiment rien d’original à dire sur Stéphane Hessel de plus que tout ce qui a déjà été dit et écrit… à part que je peux le dire avec mon cœur.

Je l’ai rencontré pour la première fois à Alger. Il était ambassadeur par intérim, c’était 3 ou 4 ans après la guerre d’Algérie. Moi je n’étais pas là pour La Cimade, mais pour une réunion des églises du Maghreb… Je connaissais déjà Stéphane Hessel de réputation car sa première femme était la cousine de Tania Metzel, aumônière en prison pour la Fédération protestante de France, et donc très proche de La Cimade dont lui même connaissait bien l’histoire… Nous nous sommes croisés à de nombreuses reprises ensuite et retrouvés côte à côte dans pas mal de combats.

  • Sur quels engagements s’est retrouvé Stéphane Hessel avec La Cimade ?

Je ne pourrais pas tous les citer. Nous nous sommes mobilisés ensemble surtout dans des opérations de défense des étrangers…, mais je me souviens également qu’il a associé Jacques Stewart, alors président de La Cimade, à deux missions au Burundi, avant et après les massacres au Rwanda. Stéphane Hessel s’est aussi retrouvé aux côtés des équipiers de La Cimade lorsque des étrangers se sont réfugiés dans des églises, dont celle de Saint Bernard… Je ne peux pas me rappeler tous ces combats communs.

  • Que souhaitez-vous retenir de ces engagements ? 

La présence et l’action de Stéphane Hessel ont toujours été pour nous un vrai stimulant. Il nous a empêché de fermer les yeux sur trop d’injustices, en particulier en ce qui concerne les droits des étrangers et ceux des Palestiniens, lutte dans laquelle La Cimade est présente. Certains peuvent s’étonner qu’un juif ayant connu la persécution nazie puisse prendre parti pour les Palestiniens contre Israël comme il l’a fait. D’autres, au contraire, trouvent cet engagement exemplaire. C’était d’ailleurs un homme complètement exemplaire. Et cela jusqu’au bout. Le dernier souvenir, c’est un coup de téléphone que j’ai reçu de lui il y a environ quinze jours en réponse à ma lettre de vœux. «  Le monde va mal » m’a-t-il dit, je lui ai répondu que c’était bien vrai mais qu’il était heureux qu’il y ait des personnalités comme lui pour contribuer à nous ouvrir les yeux… J’aurais pu conclure qu’il était découragé mais je ne pense pas que ce soit vrai. Cet homme avait une obstination dans le courage incroyable. Il a toujours considéré qu’il y avait quelque chose de plus à faire contre l’injustice. Une des leçons essentielles que je retiendrais de Stéphane Hessel, c’est qu’il faut toujours être vigilant pour décrypter l’endroit où il faut s’engager parce que le monde est en train de déraper.

Propos recueillis par Agathe Marin.

Auteur: Service communication

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