Quoi qu’il en coûte… pour leur vie
Depuis le début de l’année 2024, les tentatives d’expulsion de personnes originaires de pays ...
Au cours des derniers mois, des enfermements en rétention et des expulsions vers des pays en crise voire en guerre se sont multipliés. Revenons sur trois récentes situations observées dans les centres de rétention de Bordeaux et du Mesnil-Amelot, particulièrement représentatives de la politique actuelle de l’administration française.
Le 18 janvier dernier, un homme soudanais d’une trentaine d’années, demandeur d’asile venant d’arriver sur le territoire français, était expulsé alors qu’il était dans l’attente de son audience devant la Cour nationale du droit d’asile, qui devait statuer sur sa demande de protection. Il était enfermé depuis 90 jours au centre de rétention administrative (CRA) du Mesnil-Amelot, et ce jour devait donc être celui de sa libération – c’était sans compter l’acharnement de la préfecture de la Seine-Saint-Denis. Etant originaire du Darfour et ayant joué un rôle dans la récente révolution au Soudan, cet homme craignait pour sa vie en cas d’expulsion dans son pays d’origine.
Au même moment, dans le même CRA, une jeune femme afghane de tout juste 19 ans était enfermée par cette même préfecture. Demandeuse d’asile ayant fui le danger dans son pays et tout juste arrivée en France elle aussi, elle souhaitait rejoindre son mari et le reste de sa famille en Allemagne ; elle avait cependant été arrêtée à l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle, en possession de son passeport. Le préfet de la Seine-Saint-Denis entendait ainsi l’expulser en Afghanistan le 20 janvier – un vol était programmé ce jour pour Kaboul. Qu’importe, la politique du chiffre n’a pas de prix. Consciente qu’elle ne pouvait solliciter l’asile que dans un seul pays de l’Union européenne – qu’elle souhaitait donc être l’Allemagne –, la jeune femme choisit finalement, du fait de la gravité de la situation, de déposer une demande d’asile au CRA du Mesnil-Amelot. Elle obtient finalement la protection de la France au titre de l’asile et est libérée du centre de rétention. Elle en ressort traumatisée par plus de deux semaines de privation de liberté marquées par l’angoisse d’un possible renvoi à Kaboul.
A quelques centaines de kilomètres de là, un jeune soudanais, venu chercher une protection en France, était convoqué à la préfecture de Gironde dans le cadre de sa procédure Dublin. Il fut alors interpellé pour être enfermé au CRA de Bordeaux une nuit et transféré le lendemain à l’aube à destination de l’Allemagne, où il avait déjà reçu une mesure d’expulsion à destination du Soudan. Sans pouvoir assister à son audience devant le Juge des Libertés et de la Détention, pourtant saisi, il souhaitait publiquement exprimer ses craintes de retour, qu’il savait certain, vers son pays d’origine. En à peine un mois, c’est déjà la troisième personne rencontrée par La Cimade dans le plus petit centre de rétention de France à risquer un renvoi imminent au Soudan, internationalement reconnu comme dangereux, sous couvert du règlement Dublin et d’un renvoi dans un pays européen.
Ces trois situations sont révélatrices de la politique actuelle de l’administration française, jusqu’au-boutiste et aveugle dans sa volonté de faire du chiffre. Les placements en rétention de personnes originaires de pays où elles risquent de subir des traitements inhumains ou dégradants, et qui ne peuvent donc être expulsées sans violer l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme, se sont multipliés au cours des derniers mois, directement (via des obligations de quitter le territoire) ou indirectement (via des transferts dits « Dublin »).
Dans les CRA où La Cimade intervient en métropole (Bordeaux, Hendaye, Le Mesnil-Amelot, Rennes et Toulouse), se sont ainsi succédées en 2019 des expulsions vers le Soudan (5 expulsions), l’Afghanistan (4), l’Irak (2), l’Iran (2) et l’Érythrée (1). Ce dernier cas constitue même une première, la France s’interdisant jusqu’à présent les retours forcés vers ce pays particulièrement répressif. La jeune femme afghane enfermée au Mesnil était elle aussi proche de devenir la première femme isolée de cette nationalité à être expulsée vers son pays d’origine par un pays de l’Union européenne, malgré les risques évidents encourus.
Si cette politique interpelle, sa mise en œuvre par l’administration est pleinement assumée par le ministère de l’Intérieur, tant en amont de ces expulsions, par l’absence de consigne donnée aux préfets pour les proscrire, qu’en aval, lorsque ce même ministère n’y met pas un terme alors qu’il est directement interpellé sur ces graves situations. Saisi par La Cimade sur la situation du ressortissant soudanais enfermé au Mesnil, le ministère a ainsi maintenu la procédure d’expulsion, avec l’issue que l’on connaît.
La Cimade demande au gouvernement de mettre un terme à une politique d’expulsion vers des pays où les personnes sont gravement mises en danger.
Auteur: Admin_Ile_de_France
Depuis le début de l’année 2024, les tentatives d’expulsion de personnes originaires de pays ...
Le festival Migrant’Scène commence le jeudi 9 novembre 2024 en Île-de-France et vous propose ...
Au moins trois personnes bénéficiant du statut de réfugié ont été enfermées à l’été 2024 au ...
A la fin de l'année scolaire 2023, l'équipe sensibilisation d'Ile-de-France a monté un projet ...