Chiffres-clés : les conséquences des politiques européennes
📢 34 ans après la chute du mur de Berlin, plus de 2000 km de clôtures et murs frontaliers ont été érigé aux frontières de l’Europe
Contre à peine plus de 300 km en 2014, près de 2000 km de clôtures et murs ont été construit aux frontières de l’Union européenne en 10 ans dans plus d’une dizaine de pays : Espagne, Grèce, Bulgarie, Hongrie, Autriche, Slovénie, Pologne, Lituanie, Lettonie, Estonie, Finlande, France. Or, ces murs, clôtures, barbelés et miradors érigés aux frontières de l’espace Schengen s’accompagnent généralement d’une mobilisation policière accrue et sont les lieux de nombreuses violations des droits ainsi que d’actes de violence et d’humiliation à l’endroit des personnes exilées. Dans un rapport publié en 2023, le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) alertait sur les pratiques illégales de renvois forcés, y compris en mer, mais aussi sur de nombreuses pratiques inhumaines et dégradantes « comme tirer des balles près des personnes lorsqu’elles sont allongées sur le sol, les pousser dans des rivières (parfois avec les mains attachées), leur enlever les vêtements et les chaussures et les forcer à marcher pieds nus et/ou en sous- vêtements et, dans certains cas, les envoyer totalement nues de l’autre côté de la frontière. L’utilisation de chiens sans muselière pour menacer voire chasser les ressortissants étrangers, la saisie et la destruction de biens et la privation de nourriture et d’eau pendant des périodes prolongées ».
(Source : rapport du Parlement européen 2022)
📢 Plus de 30 000 personnes, hommes, femmes et enfants, sont mortes ou ont disparu en tentant de rejoindre l’Europe depuis 2014, soit en 10 ans
Parmi elles, 29 000 sont décédées ou ont disparu en Méditerranée : la traversée de la Méditerranée est la route migratoire la plus meurtrière dans le monde. Ces drames surviennent également dans d’autres régions, notamment dans le désert du Sahara, à la frontière orientale de l’UE ou encore aux frontières de la France avec l’Italie, l’Espagne et la Grande-Bretagne, voire sur le territoire français. Alors que l’Europe érige des murs et militarise ses frontières, les routes migratoires deviennent de plus en plus dangereuses pour les personnes qui cherchent à rejoindre son territoire et qui sont contraintes de prendre toujours plus de risques.
(Source : Missing Migrants Project – OIM)
📢 845 000 000 d’euros de budget pour Frontex en 2023, bras armé de la politique mortifère de lutte contre l’immigration de l’UE
Créée en 2004 et opérationnelle depuis 2005, Frontex est l’Agence de garde-côtes et de garde-frontières de l’Union européenne (UE). Depuis sa création, les pouvoirs de Frontex ont été élargis et renforcés afin d’étendre le contrôle et la surveillance des routes migratoires vers l’UE et d’accélérer les expulsions des personnes migrantes qui sont parvenues à atteindre le territoire européen. L’extension des prérogatives de l’Agence s’est accompagnée d’une augmentation considérable de ses moyens financiers et humains. Le budget de Frontex a explosé depuis sa création, passant de 6 à 845 millions d’euros en 2005 et 2023 (multiplié par 140 en 14 ans) ! De plus, la dernière refonte de son règlement en 2019 a doté Frontex d’un contingent permanent de garde-frontières, vêtu d’un uniforme aux couleurs européennes et bénéficiant du port d’armes, qui devrait être porté à 10 000 d’ici 2027.
Pourtant, l’incompatibilité de ses activités avec le respect des droits fondamentaux n’est plus à démontrer. Depuis plus de dix ans déjà, l’agence Frontex fait l’objet de très nombreuses accusations : complaisance ou complicité dans des opérations de refoulements en mer Egée et en Europe de l’Est ; graves dysfonctionnements internes ; mauvaise gouvernance. Au point que de nombreuses enquêtes ont été menées par les institutions européennes (Parlement européen, médiatrice européenne, Cour des comptes de l’UE, Office européen anti-fraude OLAF), et que la décharge budgétaire de Frontex pour l’année 2020 a été bloquée par le Parlement européen, signe évident de défiance.
(Source : Frontex)
📢 Plus de 18 000 enfants migrants non accompagnés ont été portés disparus en Europe entre janvier 2018 et décembre 2020, l’équivalent de 17 enfants par jour
Un chiffre potentiellement sous-évalué en raison du manque de données sérieuses dans certains Etats. De nombreux·ses mineur·e·s non accompagné·e·s, fuient des conflits, des persécutions ou une situation difficile dans leur pays d’origine et voyagent seul·e·s sur les routes de l’Europe afin d’y trouver refuge. Un sur six parmi ces mineur·e·s a moins de 15 ans. Trop souvent, ces enfants ne bénéficient pas d’un accueil adéquat, alors qu’ils et elles devraient être protégé·e·s, et deviennent ainsi des proies faciles pour les réseaux criminels. Non seulement les systèmes d’accueil nationaux sont souvent inadaptés pour les prendre en charge mais dans certains Etats aucune mesure n’est prise pour rechercher ces enfants en cas de disparition inquiétante et la coopération transfrontalière sur cette question demeure extrêmement faible.
(Source : collectif Lost in Europe)
📢 Plus de 100 000 personnes migrantes, hommes, femmes et enfants, sont enfermées chaque année en Europe pour des motifs liés à leur migration
Partout en Europe, les politiques de criminalisation de la migration se sont développées et ont amené à la multiplication des procédures et des lieux d’enfermement spécifiques aux personnes migrantes. Plus de 200 lieux dédiés à l’enfermement des personnes étrangères sont recensés sur le territoire des Etats membres. Si elle varie selon la législation des Etats, la durée légale maximale de cet enfermement peut aller jusqu’à 18 mois, dans des conditions souvent dégradantes et inhumaines, au motif d’une entrée ou d’un maintien sur le territoire jugé irrégulier. Nombre de ces personnes sont pourtant en recherche d’une protection internationale, notamment lorsqu’elles sont enfermées aux frontières, et sont parfois détenues arbitrairement en dehors de tout cadre légal. Alors que l’approche “hotspot”, mettant en place des camps d’enfermement à ciel ouvert en Italie et en Grèce, s’est révélée particulièrement inhumaine et inefficace, le nouveau pacte sur l’asile et la migration en cours d’adoption entend pourtant généraliser les procédures d’enfermement aux frontières, au détriment de l’accès aux droits fondamentaux des personnes migrantes.
(Source : Parlement européen)
📢 Plus de 400 000 personnes ont reçu l’ordre de quitter l’UE en 2022, seul 17% ont effectivement été expulsées tandis que les autres sont tombées dans une « zone grise »
La France – au 1er rang des Etats membres de l’UE – prononce entre 80 000 et 120 000 mesures d’expulsion du territoire chaque année, mais « seules » 10 000 à 16 000 d’entre elles sont mises en œuvre (reconduites hors de l’espace Schengen). Beaucoup ne sont pas exécutées car les personnes concernées sont inexpulsables en raison de la situation dans leur pays d’origine (risques d’exposition à des traitements inhumains et dégradants ou de mort) ou de leur situation dans le pays d’accueil (vie privée et familial, santé etc.), ou parce qu’elles ne sont pas reconnues par leur pays d’origine. Les personnes qui restent se retrouvent dans une « zone grise », ni ici, ni là-bas, et perdent ainsi l’accès à leurs droits fondamentaux.
(Source : Commission européenne)
📢 Plus de 16 000 personnes anciennement « dublinées » ont finalement pu enregistrer leur demande d’asile en France en 2022, après avoir attendu entre 9 et 24 mois dans les limbes de cette procédure injuste, absurde et inefficace
En France, plus de 35 000 personnes, soit un quart des premières demandes d’asile enregistrées en 2022, sont concernées. Malgré tous ces dispositifs pour tracer, traquer, contrôler les personnes dublinées en vue de leur expulsion vers l’Etat dit responsable de leur demande d’asile, le constat demeure le même : les taux de transferts restent autour de 10 %. La France ne « renvoie » et ne « reçoit » en pratique que très peu de personnes : 3 311 personnes sous procédure Dublin ont été expulsées par la France en 2022 tandis que 1 453 personnes ont été expulsées vers la France. Pourtant, cette procédure entraine des situations d’errance et d’exclusion pour des personnes en recherche de protection qui se retrouvent dans l’impossibilité d’enregistrer leur demande d’asile et perdent souvent l’accès à leurs droits. Parmi les personnes transférées dans un autre Etat européen, certaines reviennent rapidement. En effet, les raisons qui les ont poussés à quitter le pays européen dans lequel le règlement européen les assignent existent toujours.
(Sources : ministère de l’Intérieur, Eurostat)