Comment lutter contre les violences faites aux femmes ?
La violence à l’égard des femmes reste un fléau, qui fait des milliers de victimes. Les violences faites aux femmes concernent toutes les femmes, quelle que soit leur catégorie sociale ou leur nationalité. Les femmes étrangères, comme toutes les femmes, peuvent être confrontées à des violences. Cependant, toutes les femmes étrangères ne sont pas victimes de violences.
Néanmoins, les violences que les femmes étrangères peuvent subir sont aggravées par la précarité de leur statut administratif en France. Elles font face à de multiples obstacles : c’est ce qu’on appelle la double violence.
Les femmes migrantes exposées à différentes formes de violences
Les violences à l’encontre des femmes peuvent prendre différentes formes. En France, qu’elle soit le fait d’un partenaire intime ou de nature sexuelle, ces violences constituent une violation majeure des droits de la femme..
Au 02 aout 2023, 75 féminicides ont été recensés depuis le début de l’année. En 2022, 147 femmes ont été tuées. En 2021, 215 000 femmes se déclarent victimes de violences physiques et/ou sexuelles au sein du couple et 94 000 femmes victimes de viol ou de tentatives de viol.
Pourtant, moins d’une victime sur cinq de violences conjugales dépose plainte. La démarche en gendarmerie ou en commissariat est éprouvante, le grand nombre de classements sans suite de cas de violences faites aux femmes est scandaleux.
Nommer les violences pour mieux les combattre : quelles sont les violences faites aux femmes ?
Les violences faites aux femmes peuvent prendre différentes formes et peuvent être subies au sein de la sphère familiale, mais aussi dans des relations sociales, dans la rue, ou encore au travail.
La violence faite aux femmes désigne tout acte de violence fondé sur l’appartenance au sexe féminin, causant ou susceptible de causer aux femmes des dommages ou des souffrances physiques, sexuelles ou psychologiques, et comprenant la menace de tels actes, la contrainte ou la privation arbitraire de liberté, que ce soit dans la vie publique ou dans la vie privée.
— Déclaration de l’ONU sur l’élimination de la violence contre les femmes – novembre 1993
La violence s’exerce sous différentes formes avec régularité. Elle peut être physique, psychologique, sexuelle, économique ou administrative.
La violence psychologique
Il s’agit de soumettre, dominer, asservir une personne. Cette domination passe notamment par :
- le rapport de force,
- la manipulation,
- l’intimidation,
- le mépris,
- l’humiliation,
- la dévalorisation,
- des injures,
- les empêchements de dormir,
- les menaces,
- les sarcasmes.
La violence physique
Cette violence est généralement visible lors de blessures, de coups mais elle peut aussi prendre la forme de :
- coups,
- étranglement,
- tentatives d’étouffement,
- brûlures,
- interdictions de sortir,
- séquestrations.
La violence sexuelle
Ces violences à caractère sexuel sont commises sans le consentement de la personne, généralement avec contrainte, menace ou surprise. Elles sont fréquentes, comme les agressions sexuelles ou les viols, mais sont souvent méconnues, déniées voire tolérées. Il s’agit de :
- d’agressions sexuelles,
- de viols,
- de mutilations sexuelles,
- de mariages forcés.
La violence économique
La violence économique se traduit par le contrôle financier au quotidien. Elle peut par exemple conduire à l’interdiction faite à Madame de travailler, à la surveillance des comptes. La violence économique peut prendre plusieurs formes dont :
- l’argent donné au compte-gouttes,
- les comptes bancaires surveillés,
- le salaire touché à la place de la personne qui travaille,
- les biens essentiels contrôlés,
- l’interdiction de travailler.
La violence sur les enfants
Les violences envers les enfants sont trop souvent cachées, oubliées. Ils et elles peuvent être victimes de maltraitances, de négligences lourdes, de violences sexuelles, psychologiques ou physiques.
Parfois victimes également, les enfants sont presque systématiquement victimes et témoins des violences. Ils sont souvent un enjeu au cœur des violences et la grossesse est régulièrement un déclencheur des premières violences ou d’une aggravation de celles déjà existantes.
La violence administrative
Chantage aux papiers (« si tu portes plainte, je fais retirer ton titre de séjour », « si tu parles à ta famille, tu seras expulsée »), confiscation du passeport, refus de délivrer certains documents nécessaires à la régularisation.
Les femmes migrantes victimes de violences
Les femmes migrantes ne sont pas toutes victimes de violences mais elles peuvent subir toutes ces formes de violences. Les rencontres de femmes étrangères victimes de violences à La Cimade nous permettent d’indiquer que ces violences sont souvent des situations de violences au sein du couple. Les femmes étrangères sont également victimes de mariage forcé, de risque de mutilation génitale féminine, de traite des êtres humains sous ses différentes formes.
Les conséquences des violences faites aux femmes
Les violences subies sont lourdes de conséquences pour les victimes et, dans le cas où ils et elles sont parents, pour leurs enfants.
Parce que, souvent, elles ne peuvent pas se défendre efficacement en l’absence de titre de séjour, parce qu’elles ont peur d’être expulsées en cas de dépôt de plainte, parce que bénéficier d’un hébergement d’urgence, de l’aide juridictionnelle pour divorcer ou pour bénéficier d’un suivi social relève du parcours du combattant. En tant qu’étrangère, il est encore difficile d’être représentée et défendue par un·e avocat·e, d’accéder à un accompagnement social et médical ou encore à la reconnaissance des violences subies.
Les répercussions sont très importantes, notamment en termes de santé physique ou psychologique, mais aussi pour leur vie sociale ou professionnelle.
Comment agir pour aider les femmes migrantes victimes de violences
Grande cause du dernier quinquennat, un « Grenelle des violences conjugales » a vu le jour mais la situation des personnes étrangères victimes de violences est restée sur la touche. Il est pourtant grand temps de décider d’une politique forte, de faire appliquer les textes, de créer des places d’hébergement, de former les différents acteurs et actrices, et de débloquer les fonds nécessaires pour y parvenir.
Dénoncer les cas de violences
Il est urgent de continuer à communiquer et dénoncer les violences subies par toutes les personnes victimes, y compris les femmes migrantes.
Accompagner les femmes
Les femmes qui le souhaitent doivent pouvoir être accompagnées dans leurs différentes démarches, obtenir des informations justes et correctes, être protégées.
En France, depuis 2003, le droit des personnes étrangères se réduit comme peau de chagrin. Seules quelques dispositions légales ont permis de protéger les personnes étrangères des violences. Mais ces dispositions sont loin d’être suffisantes : quelques exemples :
Si vous êtes victimes de violences conjugales ou familiales, seules les femmes mariées auront droit à la délivrance et au renouvellement de leur titre de séjour. Il va alors prouver les violences subies par tous moyens : dépôt de plainte, certificat médical, attestations… mais les préfectures exigent souvent d’autres preuves comme un divorce pour faute ou une condamnation pénale. Dans d’autres situations (concubinage, PACS, etc), le préfet pourra toujours décider de vous délivrer ou de renouveler votre titre de séjour mais il ne sera pas obligé de le faire.
Si vous êtes victimes de la traite, vous pouvez aussi bénéficier d’une carte de séjour mais si et seulement si vous portez plainte pou si vous témoignez pour des faits de traite des êtres humains ou de proxénétisme. De plus, il faudra que vous prouviez que vous avez rompu tout lien avec l’exploitant ou le réseau.
Si vous êtes victime d’un viol dans la rue, ou d’autres types de violences en France, le droit des étrangers ne prévoit pas de disposition pour que vous puissiez vous maintenir sur le territoire. Ce qui, en 2023 est plus que problématique.
Il est aussi possible de faire une demande de protection internationale si vous arrivez à prouver que vous ne pouvez pas retourner vivre dans votre pays d’origine. Nous constatons certaines avancées notamment en ce qui concerne l’émergence des questions liées au genre dans le droit international. Néanmoins, les autorités françaises peinent toujours à considérer ces persécutions comme relevant de la Convention de Genève. Par exemple, pour être reconnues réfugiées les personnes fuyant un mariage forcé doivent montrer que leur attitude en refusant le mariage est considéré par tout ou partie de la société comme transgressive des normes sociales et qu’elles s’exposent à des persécutions contre lesquelles les autorités du pays refusent ou ne sont pas en mesure de les protéger. Mais les autorités françaises refusent souvent de reconnaître la transgression des normes sociales, arguant que les conséquences d’un mariage forcé ou de violences conjugales restent cantonnées à la seule sphère familiale et n’apparaissent pas, en l’espèce, constituer une transgression des lois et coutumes.
Demander de l’aide à La Cimade : aide juridique et accompagnement pour femmes et personnes étrangères victimes de violences
La précarité administrative ne doit pas être un obstacle pour protéger des êtres humains. Ces femmes se battent au quotidien pour faire valoir leurs droits. Il est temps de les écouter.
→ Pour en savoir plus, consultez notre guide “Comment mieux accompagner les personnes étrangères victimes de violences ?”
Les violences subies par les hommes étrangers
Plus à la marge, les hommes sont aussi parfois victimes de violences de la part de leur conjoint·e français·e ou encore exploités par leur employeur. Leur protection est aussi mise à rude épreuve. La Cimade les accompagne aussi dans leurs différentes démarches.