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Comment sont orientés les flux migratoires ?

La définition des flux migratoires internationaux, selon l’Organisation des Nations unies, correspond au « nombre de migrants internationaux arrivant dans un pays (immigrants), ou nombre de personnes quittant un pays (émigrants) pendant une période déterminée[1] ». Ce terme statistique doit être utilisé avec parcimonie. Il massifie un phénomène plus complexe et invisibilise des parcours individuels. Désincarner les mobilités, notamment forcées, tout en les montrant globales et en indiquant généralement qu’elles ne vont que dans une direction (qui serait du « Sud » vers le « Nord ») ne représente pas la réalité des faits et participe à faire le lit des discours xénophobes et racistes, tout en justifiant une politique migratoire plus ferme. Ainsi, il existe à des moments donnés des routes migratoires plus ou moins empruntées par tout un ensemble de personnes aux vécus singuliers, parties pour des raisons qui leurs sont propres, et qui ne vont pas connaître les mêmes facilités ou difficultés tout au long de cette route.

La Cimade préfère employer les termes de « parcours migratoires », de « personnes migrantes » et tout simplement de « personnes » : ils permettent de mieux saisir le caractère individuel des vécus, et d’humaniser des parcours de personnes souvent homogénéisées dans les discours.

Quels sont les principaux flux migratoires ?

En 2020, selon les Nations unies, les migrant·e·s internationaux·ales représentent 280,6 millions de personnes, soit 3,6 % de la population mondiale[2].

Voir la définition de Migrant·e·s internationaux·ales

Les migrations se font principalement entre pays à fort niveau de développement. 190 millions des migrant∙e∙s internationaux∙les, soit près de 67 %, résident dans un pays à IDH (indice de développement humain) très élevé ou élevé. Ces deux catégories sont également les pays d’émigration les plus importants : ils étaient à l’origine de 162 millions des personnes migrantes en 2020, soit 58%[3]. Ainsi, ces pays sont donc à la fois attractifs et émetteurs de migrant·e·s internationaux·ales. Par ailleurs, cette migration en provenance de pays à développement humain élevé et très élevé à destination d’autres pays de ces catégories a fortement augmenté depuis 1995.

De manière générale, la majorité des mouvements migratoires sont intracontinentaux. Ainsi, en 2020, 52,5% des migrant·e·s internationaux·ales ressortissant·e·s d’un pays d’Afrique vivaient dans un pays du même continent. C’était également le cas pour 60% des migrant·e·s internationaux·ales ressortissant·e·s d’un pays d’Asie, et 70% pour ceux d’Europe[4].

Selon l’ONU, parmi les vingt principaux « flux migratoires » à l’international entre deux pays en 2020, 12 concernaient des pays frontaliers ou relativement proches[5] : 11 millions de personnes du Mexique vers les États-Unis, près de 4 millions de la Syrie vers la Turquie, 3 millions de la Russie vers l’Ukraine et de l’Ukraine vers la Russie, 3 millions de l’Afghanistan vers l’Iran et 3 autres millions vers le Pakistan.

Au-delà de la notion de « flux migratoires », les déplacements de population n’impliquent pas forcément le passage d’une frontière internationale. S’il est difficile d’évaluer avec précision le nombre de personnes quittant leur foyer pour des raisons voulues et forcées au sein de leur propre pays, le HCR estime à mi-2022 que 53,1 millions de personnes sont déplacées internes dans le monde[6], pour des raisons de conflit, de violence, de persécution, de catastrophe naturelle ou autre.

Qu’en est-il des flux migratoires vers la France et l’Europe ?

Selon les Nations Unies, 86,7 millions de migrant·e·s internationaux·ales résidaient en Europe en 2020, parmi lesquels 3,85 millions de réfugié·e·s et de personnes en demande d’asile. Un peu plus de la moitié était né dans un autre pays européen (50,5%)[7], tandis que 5,9 % étaient issus d’Afrique sub-saharienne, 16% d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient, et 6,2% d’Amérique du Sud et des Caraïbes. En Europe, une majorité relative de mouvements s’effectue ainsi d’un pays européen vers un autre.

Si les « flux migratoires » vers l’Europe, notamment depuis l’Afrique, dominent dans les discours politiques et médiatiques, c’est qu’ils se concentrent sur les entrées irrégulières sur le territoire. Or, elles ne représentent qu’une partie des migrations internationales : en 2015, le nombre d’arrivées irrégulières a atteint un pic exceptionnel en Europe à 1 million de personnes (chiffre en régression depuis, atteignant en 2022 environ 160 000 arrivées irrégulières[8]) alors que pour la France seulement, le nombre de visas délivrés en 2018 était supérieur à 3,5 millions.

La France était, en 2020, le 7ème pays d’accueil dans le monde de migrant·e·s internationaux·ales, avec 8,1 millions de personnes, soit 12,4 % de sa population[9]. Cependant, le nombre de primo-entrant·e·s sur le territoire français a beaucoup diminué depuis le milieu des années 1970 : selon l’OCDE, le « flux d’immigration à caractère permanent »[10] en 2019 par rapport à la population totale de la France était de 0,4 %, soit plus faible que la moyenne de l’UE (0,8%), la Suède (plus d’1 %) ou de la Suisse (1,4%)[11]. Cela signifie que la France attire moins de personnes qui viennent s’installer durablement que d’autres pays à haut niveau de développement.

En 2022, on comptait 499 486 personnes réfugiées en France, soit 5,8 % du nombre total de migrant·e·s internationaux.ales dans le pays[12]. Le pays se plaçait alors au 13ème rang mondial en termes d’accueil de personnes réfugiées dans le monde[13]. Ainsi, la France, contrairement aux idées-reçues, est loin d’être le pays accueillant le plus pour les personnes réfugiées et acceptant le plus de demandes d’asile.

 

[1] Organisation Internationales pour les Migrations, Termes clés de la migration

[2] Organisation Internationale pour les Migrations, « État de la migration dans le monde 2022 », page 2, 2022

[3] Organisation Internationale pour les Migrations, « État de la migration dans le monde 2022 », page 216, 2022

[4] Idem, p. 62, 76 et 90

[5] Idem, p. 29

[6] HCNUR, « Tendances mondiales, Déplacement forcé en 2021 », page 2, 2022.

[7] Organisation Internationale pour les Migrations, « État de la migration dans le monde 2022 », p. 90 et 91, 2022

[8] HCNUR, « Situation en Méditerranée », section Demography of Mediterranean sea arrivals from January 2022

[9] Idem, p. 215.

[10] Définition OCDE : nombre de personne entrant de façon régulée pour s’installer dans le pays de destination.

[11] Ministère de l’Intérieur, « La population étrangère en France et dans les autres pays », 2020

[12] Cf. Note de bas de page 6, p. 27

[13] Classement des pays par nombre de réfugiés, selon les estimations de milieu d’année 2021 du HCR

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