Pour l’avenir de Mayotte, l’Etat promet toujours plus d’inégalités
Alors que la colère gronde à Mayotte et que les revendications se font plus pressantes que ...
Dans le cadre des états généraux des violences faites aux femmes qui se tiennent les 25 et 26 novembre 2016 à La Réunion, La Cimade a souhaité porter le regard, alerter sur la situation des femmes étrangères, souvent victimes d’une double violence.
[Portrait réalisé par Sébastien Sailly]
Si la loi du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers prend mieux en compte la situation des femmes étrangères victimes de violences, ces dernières sont encore trop souvent ignorées et ne jouissent pas des droits fondamentaux pourtant inhérents à tout être humain.
Les violences conjugales sous le prisme du droit au séjour sont en effet généralement mal connues des acteurs administratifs et sociaux.
Celles qui choisissent de mettre fin aux violences morales, physiques, sexuelles, aux insultes et aux menaces, ou au chantage aux papiers, peuvent être confrontées à une autre violence, la violence administrative.
Une violence aux multiples visages
La violence s’exerce sous différentes formes : elle peut être d’ordre physique, psychologique, sexuelle ou économique. Pour les femmes étrangères qui se trouvent dans des situations de dépendance vis-à-vis de leur conjoint, la violence peut également se traduire par un chantage aux papiers, la confiscation du passeport, le refus de délivrer certains documents nécessaires à la régularisation de leur situation.
Le droit au séjour : un enchaînement administratif à un conjoint violent
La délivrance et le renouvellement du titre de séjour pour les « partenaires de » sont conditionnés par la « communauté de vie ». Quel choix une femme étrangère victime de violences conjugales a-t-elle alors entre, d’une part quitter son conjoint avec le risque de perdre son droit au séjour ou d’autre part, rester et se maintenir dans le cycle des violences ?
Si légalement, une femme étrangère, conjoint de français ou entrée dans le cadre du regroupement familial, peut obtenir un titre de séjour ou son renouvellement lorsqu’elle est victime de violences conjugales, c’est à condition toutefois d’en apporter la preuve !
Quant aux femmes étrangères non mariées, qui subissent des violences de la part de leur partenaire ou concubin, le législateur n’a pas souhaité ouvrir un droit au séjour !
La délicate voire l’impossible preuve des violences
La preuve des violences subies demeure problématique : on exige de la personne étrangère qu’elle apporte des traces visibles de la violence qu’elle a subie. C’est l’idée que la violence n’existe que si elle peut se voir. Or, les violences morales et psychologiques, le chantage aux papiers ne se voient pas. De la preuve des violences découle pourtant la reconnaissance de la qualité de victime, reconnaissance nécessaire pour espérer le maintien d’un droit au séjour.
En outre, l’isolement induit par le déracinement, la barrière de la langue, la perte de repères dans un pays dont l’organisation diffère du pays d’origine, accentue la difficulté à cerner les démarches à engager (forces de l’ordre, services sociaux, témoignages de l’entourage).
Alors même qu’elle n’est pas responsable de cette situation, en opposant à une victime la rupture de la communauté de vie comme cause de refus de délivrance d’un titre de séjour, faute de preuve, l’administration exerce ainsi une autre forme de violence.
Deux temps incompatibles : le temps administratif et celui de la reconstruction personnelle
Fréquemment dénoncée à la préfecture par le conjoint violent, la femme étrangère victime de violences qui a quitté le domicile, doit alors, sous un délai de 15 jours, justifier de sa situation. Cassée, épuisée, elle doit constituer un dossier pour espérer maintenir son droit au séjour.
A cela s’ajoutent des délais très longs pour l’examen de leur situation : il est fréquent que la personne se voit remettre des récépissés successifs, la plaçant davantage dans une situation de vulnérabilité, l’empêchant de trouver un hébergement et un travail stable.
» Télécharger le document
Auteur: Région Outre-Mer