Migrant’Scène bat son plein! Par-delà les montagnes et les frontières, tissons des liens entre les peuples !
Migrant.es d’ici et d’ailleurs, exilé.es victimes des guerres, de la misère et de catastrophes ...
Durant cette période particulière, pour rester aux côtés des personnes que La Cimade accompagne, nos pratiques ont dû trouver de nouveaux chemins pour faire vivre nos dynamiques collectives d’apprentissage du français. Les supports numériques, même s’ils ne remplaceront jamais la qualité des échanges en présentiel, se sont avérés être les seuls outils disponibles pour continuer à « garder le lien ». Pour illustrer la situation, deux bénévoles de Tarbes ont bien voulu répondre à nos questions.
Malgré la difficulté d’échanger dans une langue étrangère sans être physiquement présents, des rencontres ont pu avoir lieu grâce au numérique. En plus des sites web et applications dédiées à l’apprentissage du français, certains d’entre nous ont fait naitre des espaces de partage au travers de rendez-vous téléphoniques, d’échanges de mails et la création de groupes par messagerie instantanée. À Caen, Dijon, Massy et Clermont-Ferrand, tant les bénévoles que les apprenants étaient heureux de se retrouver et de pouvoir échanger à nouveau en français. Ainsi à Marseille, une bénévole a même créé et alimenté une page Facebook pour son groupe d’apprenants. Nous avons pu garder le lien mais au-delà de l’apprentissage nous avons été vigilants à ne pas laisser les personnes dans l’incompréhension et l’isolement face à cette situation. Depuis le déconfinement, les activités à distance se poursuivent et des rencontres « en vrai », en extérieur ou en groupes restreints commencent à se programmer à Tarbes, Lyon, Caen, Béziers et Lille. Ces dernières seront l’occasion de clôturer l’année.
Forts de ces expériences, certains d’entre nous évoquent aujourd’hui le numérique comme pouvant compléter notre pratique ; et nous souhaitons développer nos compétences pour pouvoir utiliser pleinement ces outils. Cette évolution des pratiques, si elle se pérennise dans le temps, posera la question de l’accès au numérique des personnes que nous accompagnons. Car souvent, trouver un espace calme, un ordinateur de qualité, se connecter au wifi ou à la 4G posent problème aux apprenants.
Du côté de la formation des bénévoles, Claire-Lise Dautry (référente pédagogique bénévole à Paris) a initié les premières interventions à distance à la demande de bénévoles qui voulaient se retrouver mais aussi se former, échanger, mutualiser. Et cela est possible même chacun chez soi grâce aux nouveaux outils numériques : Claire-Lise est intervenue par visioconférence pour un temps de formation dédié à des aspects techniques de l’apprentissage du français comme « La construction de séances pédagogiques » et « Les pratiques de l’oral ». Ces deux formations ont été suivies et très appréciées par les bénévoles de Lille et Lyon ; d’autres sont en cours de programmation.
Si vous souhaitez en savoir plus ou échanger sur le sujet de la formation à distance, vous pouvez nous écrire ici.
Témoignages de Marguerite Gomez et Tensia Peyrou, bénévoles au sein de groupe local de Tarbes
Marguerite Gomez : J’ai rejoint le groupe local de Tarbes il y a un an et demi. Nous sommes une dizaine de bénévoles engagés sur les ateliers socio-linguistiques. Je participe aussi à la permanence juridique, mais je débute.
Tensia Peyrou : Au moment de ma mise à la retraite, mon idée première était d’être socialement utile.
Étant donné le contexte social, j’ai eu l’opportunité d’appliquer ce que je pensais savoir-faire : communiquer et aider des personnes étrangères (demandeurs d’asile) conscientes que leur intégration passait par un apprentissage de la langue française.
J’ai la chance, depuis 2014, d’accompagner des apprenants deux fois par semaine, durant deux heures, dans un groupe au niveau dit de « confirmés », niveau intellectuel, souvent, supérieur au mien. Ce qui permet d’évoluer plus rapidement !
Et je parle de chance car si, au départ, l’objectif était pour eux de « comprendre et se faire comprendre », actuellement, ces apprenants sont capables de très bien s’exprimer en français avec des termes, souvent choisis. L’écriture est plus difficile, mais on y travaille ! Une chose importante aussi, c’est la relation de confiance que je cherche à avoir avec ces apprenants et l’envie, chaque fois, de créer « un groupe » avec une vraie relation.
M. G. : J’ai été en lien avec plusieurs jeunes mineurs non accompagnés. Pendant cette période, ils n’avaient plus de cantine le midi, alors qu’on avait réussi que celle-ci soit prise en compte par le fonds social du lycée. Ils ne savaient pas quelles démarches ils pouvaient faire, ni même s’ils pouvaient en faire. Comme beaucoup de structures et associations étaient fermées, ils pensaient qu’ils n’avaient plus le droit à rien. Avec les référents scolaires solidaires, on a réussi à s’organiser pour qu’ils bénéficient d’une somme d’argent pour pouvoir acheter des produits frais, en plus des colis alimentaires. Leur lycée, qu’on a sollicité, leur a aussi débloqué une aide financière. Il a fallu trouver des solutions pour qu’ils aient accès aux droits sociaux. Pour obtenir quelque chose, il y a toujours une demande à déposer. Si on ne bataille pas, on n’a rien.
T. P. : Je pense que c’est l’abandon qu’ils ressentent. Abandon au sens large : social, administratif, associatif, sanitaire et surtout financier.
Le groupe d’apprenants que j’accompagne sont, pour la plupart des sans-papiers, avec enfants, qui vivent « cachés ». Donc plus de travail au noir donc plus d’argent pour vivre, pour payer le loyer…
M. G. : Pendant le confinement, toutes nos activités en présentiel ont été suspendues. Nous ne pouvions donc pas maintenir nos ateliers. Mais certains formateurs ont toutefois réussi à poursuivre l’action à distance, par mail et téléphone, surtout avec les groupes les plus avancés.
J’ai pour ma part un groupe de débutants et nous avons repris le lien par téléphone. Nous avons fait des « Quoi de neuf ? ». Ce sont des temps de discussion libre qui permettent l’apprentissage du français aussi bien à l’oral qu’à l’écrit. Lors de l’entretien téléphonique, on se met d’accord sur des phrases, un texte commun, à partir duquel on va travailler. Même si la participation est très variable d’un atelier à l’autre, j’ai en temps normal un noyau stable d’une quinzaine de personnes. Pendant le confinement, j’ai contactés ceux dont j’avais le numéro. Ils ont été quatre à participer. Pour le moment, je le fais de manière individuelle par téléphone mais nous avons prévu de nous retrouver tous ensemble par visio-conférence la semaine prochaine, et bientôt nous l’espérons en « vrai » dans un parc de la ville.
T. P. : Je ne peux parler que des ateliers sociaux linguistiques (ASL) et plus précisément du groupe que j’anime.
J’ai les numéros de téléphone et quelques courriels que les apprenants me donnent à la rentrée pour les avertir d’absences éventuelles ou de faits importants. Pour pouvoir travailler le français, ils ont des liens vers des sites qui proposent des exercices avec correction. Dès le début du confinement, je leur ai envoyé un message de soutien et une proposition d’aide de ma part. Ce fut le début d’échanges qui ont perduré. Cette période a été très riche en vidéos amusantes ou informatives. Elles ont aussi alimenté nos échanges ! Merci la technologie ! Je ne sais pas si j’ai bien fait mais je les ai aussi régulièrement, tenus informés de l’avancée des actions liées à « la régularisation ». Ce qui les préoccupe beaucoup. Et puis, il y a eu d’autres échanges comme des demandes de corrections de lettres personnelles, d’accompagnement physique (un vaccin d’un enfant), de corrections de devoirs des enfants, d’aide matérielle…
Actuellement, depuis le déconfinemnt, pour éviter les cours en présentiel dans les salles de la Cimade, j’organise, une fois par semaine, un cours oral sous le kiosque d’un magnifique jardin public. Ce qui permet de se voir, en vrai ! Et ça, c’est joyeux !
M. G. : Les liens de confiance ont été essentiels pour pouvoir fonctionner dans une période comme celle-ci, d’autant que nous n’avons pas eu le temps de l’anticiper. Nous faisions le jeudi une sortie cinéma et le lundi tout s’arrêtait. Même si rien ne remplace le présentiel, qui est très important, nous pourrions envisager que les activités à distance viennent compléter les ateliers. Cette expérience a été vraiment intéressante par rapport au travailler de l’oral. Il faudrait aussi penser à anticiper l’organisation, au cas où cette situation serait amenée à se reproduire.
T. P. : J’ai la confirmation que confinement ne veut pas dire isolement. Et comme je l’ai dit plus haut, une des choses importantes pour moi, c’est la relation de confiance que je cherche à avoir avec les apprenants et l’envie, chaque fois, de créer « un groupe » avec une vraie relation. Et là durant cette période, cette relation a pris tout son sens.
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Auteur: Responsable FLE
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