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Le Conseil constitutionnel mettra-t-il fin au délit de solidarité ?

27 juin 2018

Douze organisations, dont La Cimade, intervenaient volontairement devant le Conseil constitutionnel le mardi 26 juin à l’appui de Cédric Herrou et Pierre-Alain Mannoni, condamnés par la cour d’appel d’Aix-en-Provence pour leurs actes de solidarité avec des personnes migrantes. Réponse le 6 juillet : les poursuites pour délit de solidarité sont-elles conformes ou non à la valeur de fraternité, inscrite dans la Constitution et dans la devise de la République ?

Le Conseil constitutionnel est très attendu dans la réponse qu’il doit faire à une QPC (« question prioritaire de constitutionnalité ») sur les articles du code des étrangers concernant le délit d’aide à l’entrée, à la circulation et au séjour irrégulier (L. 622-1 et -4 du Code de l’entrée, du séjour des étrangers et du droit d’asile) – généralement rebaptisé dans le monde associatif « délit de solidarité » puisque ces articles sont fréquemment utilisés pour poursuivre des personnes qui manifestent leur solidarité envers des personnes migrantes ou des sans-papiers. L’audience a eu lieu mardi 26 juin 2018.

Aux côtés des deux principaux requérants, Cédric Herrou et Pierre-Alain Manonni, tous deux condamnés par la cour d’appel d’Aix-en-Provence, douze organisations (*) s’étaient constituées intervenantes volontaires, portant ainsi la voix de quatre cents autres organisations signataires d’un manifeste intitulé Délinquants solidaires, qui réclame la suppression effective des poursuites contre des aidant·e·s.

Selon le gouvernement, le délit de solidarité aurait été supprimé avec la loi du 31 décembre 2012 au moyen des clauses d’exemption prévues par le 3e de l’article L. 622-4 du CESEDA. En réalité, il n’en est rien.

Comme l’a démontré M° Paul Mathonnet, avocat des organisations intervenantes volontaires,  la loi a été déviée de sa cible, à savoir les filières à but lucratif : les exemptions, bien trop restrictives, ne concernent que l’aide au séjour et pas l’aide au transport et à l’entrée, et, surtout, maintiennent une incrimination a priori qui suppose, pour bénéficier d’une exemption, que soit apportée la preuve que l’on se trouve dans l’un des cas prévus pour cela. « Ainsi », a-t-il dit, « la solidarité peut encore être un délit ; et lorsqu’elle ne l’est pas, elle est suspecte, voire regardée comme un acte de défiance à l‘égard des autorités de l’État ».

L’axe majeur de la plaidoirie consistait à rappeler que la devise française comporte la notion de fraternité, qui a une valeur constitutionnelle : « Si la fraternité ne se décrète pas, et ne s’impose pas, les actes qui la mettent en œuvre – ces gestes désintéressés ou humanitaires – doivent être protégés de toute restriction qui  ne serait pas justifiée ».

La demande qui est faite au Conseil constitutionnel est ainsi la censure globale des articles L. 622-1 et L. 622-4, « solution la plus logique ».

La décision doit être rendue le 6 juillet.

Toutes celles et ceux qui, de façon désintéressée, viennent en aide à des personnes en situation de précarité sans s’inquiéter de leur situation administrative attendent avec impatience de savoir si la fraternité est ou non, aux yeux du Conseil constitutionnel, une valeur à préserver.

 

(*) La Cimade, le Collectif National Droits de l’Homme Romeurope, Emmaüs France, la Fédération des Associations de Solidarité avec Tou-te-s les Immigré-e-s (FASTI), la Fondation Abbé Pierre, le Groupe d’information et de soutien des immigrés (GISTI), la Cabane Juridique / Legal Shelter, Médecins du Monde, Médecins sans frontières, le Syndicat des avocats de France (SAF), Terre d’Errance (62), le Syndicat de la Magistrature (SM)

Auteur: Service communication

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