Quels sont les bateaux qui sauvent les personnes migrantes ?
Aquarius, Alan Kurdi, Sea Watch… Ces noms, souvent prononcés dans les médias, sont ceux de navires utilisés pour des opérations de sauvetage en mer. Véritables étendards de la liberté, ces bateaux représentent parfois l’unique chance de survie des personnes migrantes. L’été, quand le temps est plus clément, le nombre de traversées augmente, et la présence des navires de recherche et de sauvetage devient indispensable.
Sea watch 3 – ONG SEA WATCH (Allemagne)
L’ONG allemande Sea Watch possède l’un des navires de sauvetage en mer les plus grands : le Sea Watch 3. Le bateau a pour nationalité de rattachement les Pays-Bas et non celle de son propriétaire ou locataire. En langage maritime, on dit qu’il “bat pavillon néerlandais”. L’ONG a décidé de le rattacher au Pays-Bas, principalement parce qu’il n’y a pas de restriction de taille pour l’enregistrement d’un navire non commercial. Le Sea Watch 3 dépend donc de la réglementation de ce pays.
Cet été, le bateau a secouru 53 personnes migrantes au large de la Libye, en toute logique il aurait dû pouvoir décharger en Italie, l’un des pays de l’Union Européenne le plus proche. C’était sans compter sur la politique d’immigration répressive de l’État. La situation lui vaut un véritable bras de fer avec le gouvernement italien : malgré une interdiction d’entrer dans les eaux territoriales italiennes, la capitaine allemande Carola Rackete a pris la décision de débarquer les personnes migrantes rescapées dans le port de Lampedusa. Depuis lors, le capitaine est visé par deux enquêtes. L’une pour résistance à un officier en pénétrant de force dans les eaux italiennes, et la seconde pour aide à l’immigration clandestine.
En moins d’une semaine, l’ONG a recueilli plus de 1,4 million d’euros pour payer ses frais de justice et la poursuite de ses missions grâce à une collecte de fonds et au rassemblement de plusieurs associations, dont La Cimade. Le Sea Watch 3 est en attendant toujours sous séquestre dans le port de Licata en Sicile.
Ocean Viking – ONG SOS Méditerranée
L’Ocean Viking est un navire affrété par l’ONG SOS MÉDITERRANÉE, anciennement en collaboration avec les équipes de MSF. Il bat pavillon norvégien. Fidèle au principe de solidarité des gens de mer, l’ONG a pour objectif de sauver des naufragé·e·s qui fuient : un gouvernement oppressif, une guerre, une situation socioéconomique invivable.
Si l’Ocean Viking est encore peu renommé, l’Aquarius, son prédécesseur, a su mettre en lumière le sujet de l’aide à l’immigration. Devenu un symbole des tensions entre les différents pays de l’Union Européenne face à la crise migratoire, près de 29 500 personnes auraient été secourues à son bord entre 2016 et 2018 selon l’ONG. Son pavillon ayant été retiré à deux reprises par Gibraltar puis par le Panama, l’Aquarius a été contraint d’abandonner sa mission. En 2018, La Cimade avait participé à la mobilisation citoyenne organisée par SOS MÉDITERRANÉE pour permettre à l’Aquarius de reprendre ses missions. L’Ocean Viking, toujours en mer, continue de sauver des vies humaines.
Mare Jonio – Mediterranea Saving Humans (Italie)
Le Mare Jonio fait partie des bateaux qui sillonnent la mer Méditerranée à la recherche de personnes migrantes à la dérive. Le Mare Jonio appartient à Mediterranea Saving Humans, son armateur, Erasmo Palazetto, est également responsable de l’Alex.
Mediterranea Saving Humans s’autoproclame plateforme citoyenne résistante à la politique anti-immigration. Plusieurs collectifs œuvrent ensemble pour organiser les opérations de sauvetage de personnes migrantes. Le bateau bat pavillon en Italie, malgré le régime oppressif envers l’immigration.
Le Mare Jonio est à l’origine du sauvetage de 237 personnes. Précédemment mis sous séquestre à trois reprises, le navire a forcé l’interdiction italienne en approchant le port de Lampedusa en septembre 2019. Le bateau a finalement été saisi administrativement et l’organisation écope d’une amende de 300 000 euros pour violation du décret sécurité Bis.
Open Arms – OPEN ARMS (Espagne)
L’Open Arms est l’initiative de l’ONG de secours en mer espagnole Proactivia Open Arms. En 2018, le réseau Migreurop dont La Cimade fait partie, a publié un communiqué inter associatif dénonçant la politique de criminalisation des secours citoyens. L’Open Arms avait sauvé 87 personnes migrantes d’une possible noyade et était prêt à les débarquer sur l’île de Lampedusa, faisant fi des gardes-côtes libyens. Le bateau a finalement été saisi par les autorités italiennes pour “problèmes de sécurité” et les membres d’équipage ont été poursuivis pour “association criminelle visant à faciliter l’immigration clandestine”.
l’Alan Kurdi – ONG allemande Sea Eye
En pleine pandémie de COVID-19 seuls deux navires de secours, dont l’Alan Kurdi, sillonnaient encore la route la plus dangereuse du monde, celle de la mer Méditerranée centrale. L’Alan Kurdi, navire appartenant à l’ONG allemande Sea Eye, revendique avoir sauvé 14 621 vies depuis le début de ses missions de sauvetage.
Fin août, le bateau de secours a repêché 13 personnes migrantes tunisiennes en mer. Les autorités maltaises et le gouvernement italien n’étaient pas prêts à accueillir les ressortissant·e·s tunisien·ne·s et ont tous deux refusé le débarquement sur les côtes. Les personnes rescapées sont resté·e·s bloqué·e·s 10 jours et ont finalement été débarqué·e·s au compte-goutte à Malte, après des jours de négociations.
Quels sont les difficultés rencontrées par les bateaux
Les bateaux de recherche et de sauvetage devraient pouvoir concentrer l’entièreté de leurs missions sur l’aide humanitaire au lieu d’être constamment limités par les autorités et les gardes-côtes. Les ONG font face à des pays européens dans l’incapacité de s’entendre sur l’accueil des personnes réfugiées. Pendant ce temps-là chaque année ce sont des milliers de personnes que l’on retrouve mortes en mer.
La Cimade milite aux côtés des ONG de sauvetage en mer pour que les personnes exilées puissent être accueillies en Union Européenne. Nous devons exiger des États de l’UE une vraie politique européenne en matière d’aide humanitaire en Méditerranée. Pour que ces personnes puissent vivre dignement et aient accès aux droits humains comme tout citoyen.
Les ONG ont observé que lorsque les gouvernements de l’Europe trouvent un accord, ils sont capables de répartir les arrivées sur leur territoire. Une solution est donc possible : la justification de la “crise migratoire” ne tient pas, nous sommes en réalité face à une crise de l’accueil.
Résolument engagée sur les questions internationales et européennes liées aux migrations, La Cimade mène un travail de plaidoyer en lien avec de nombreux partenaires en France et à l’international. Vous souhaitez vous mobiliser pour défendre l’accueil des personnes migrantes ? Agissez aux côtés de La Cimade, faites un don.