La Cimade en région AuRa se mobilise pour la marche des migrant.e.s
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Article Place Gre’net 20 octobre 2018 MINEURS ÉTRANGERS NON ACCOMPAGNÉS : RAPPELÉ À L’ORDRE, LE DÉPARTEMENT DE L’ISÈRE REPREND LA MAIN FOCUS – Après le Conseil d’État en 2017, le tribunal administratif de Grenoble a sommé le Département de l’Isère de respecter la loi en matière de prise en charge des mineurs étrangers non […]
Article Place Gre’net 20 octobre 2018
MINEURS ÉTRANGERS NON ACCOMPAGNÉS : RAPPELÉ À L’ORDRE, LE DÉPARTEMENT DE L’ISÈRE REPREND LA MAIN
FOCUS – Après le Conseil d’État en 2017, le tribunal administratif de Grenoble a sommé le Département de l’Isère de respecter la loi en matière de prise en charge des mineurs étrangers non accompagnés. Sur le terrain, la « résistance » s’organise : un collectif de jeunes en difficulté a vu le jour. De son côté, le Conseil départemental a annoncé sa volonté de mieux gérer l’accueil et l’accompagnement des jeunes en reprenant en main le pilotage du dispositif et en accélérant certaines procédures.
Progressivement et laborieusement, la prise en charge des jeunes étrangers s’organiserait-elle en Isère ? Vendredi 19 octobre, alors qu’associations et syndicats* s’étaient rassemblés autour du tout jeune collectif Jeunes étrangers en Isère devant l’Hôtel du Département réuni en séance publique, la vice-présidente en charge des actions de solidarité et de l’insertion a, une fois n’est pas coutume reçu une délégation.
Car le ton monte entre les associations et la collectivité autour de la question de l’accueil et de la prise en charge, notamment en matière de formation, des mineurs dans le département.
Cent vingt mineurs étrangers accueillis chaque mois en Isère
De fait, l’Isère est en France le département qui accueille le plus de mineurs étrangers non accompagnés. Ils étaient 1 300 en 2017. Et les associations estiment qu’il en arrive 120 chaque mois, « même s’il y en a qui repartent ». Des jeunes qui viennent principalement du Mali et de Guinée.
Vendredi, quelques-uns d’entre eux sont revenus sur leur parcours et leur difficulté à s’intégrer en attendant le feu vert des autorités françaises pour rester sur le territoire.
Car certains n’ont jamais été scolarisés. Les associations à leurs côtés, ils ont pourtant frappé à la porte de l’Adate qui, à Grenoble, assure depuis 2008 l’accompagnement administratif des mineurs non accompagnés. Avec souvent le même retour : « Ils ne m’ont jamais rien proposé », déplore Ousmane, un jeune Malien.
Lui parle le français, l’anglais, l’arabe ainsi que le bambara, le dioula et le malinké. Aujourd’hui tout juste majeur, Ousmane est à la rue, sans famille ni accompagnement. D’autres ont eu plus de chance. Pour l’instant. Oumar, un jeune Malien de 18 ans, en France depuis deux ans, a été scolarisé. « J’ai un patron qui veut m’embaucher depuis quatre mois, souligne-t-il. Mais le Département refuse de demander l’autorisation de travail. Maintenant, j’ai 18 ans et j’ai reçu une OQTF [obligation de quitter le territoire français, ndlr] alors que je suis en formation en CAP de maçonnerie. »
Car pour l’administration, il demeure toujours des doutes quant à l’âge de ces jeunes arrivés en France. Mineurs ? Majeurs ? L’évaluation a été confiée à l’Adate. Mais elle ne sied guère aux associations. Parfois jugée trop lente – « ils jouent la montre », se désolent certains –, parfois trop expéditive.
« Et le Département ne scolarise pas tant que la minorité n’est pas confirmée », fait remarquer Aurélie Marcel, avocate à Grenoble et membre de l’Institut des droits de l’Homme. Justement, cette expertise de reconnaissance de minorité, tout comme la mise à l’abri préalable de ces mineurs, est désormais reprise en main par le Département.
« Ce n’est plus l’Adate qui évalue. L’entretien sera fait par le Département, poursuit Aurélie Marcel. Cela ira plus vite. En quelques jours, soit le jeune est mineur et il sera scolarisé, soit il est majeur et il sera tout de suite mis dehors. »
De fait, le Département a fait le choix de ré-internaliser le premier accueil afin de reprendre le pilotage du dispositif dans son ensemble. « Nous faisons face à notre responsabilité depuis le début en adaptant sans cesse notre dispositif pour parvenir à continuer d’accueillir, pour évaluer avec le plus de précision possible et dans les meilleurs délais, et pour dimensionner notre dispositif de protection de l’enfance en conséquence », plaide la vice-présidente du Département, Sandrine Martin-Grand.
Un budget multiplié par quatre mais encore insuffisant
« Nous n’avons pas attendu les revendications dans la presse ni dans l’hémicycle pour agir et rechercher des solutions, insiste la vice-présidente. Ce sujet nous mobilise beaucoup et demande une gestion quotidienne, globale et humainement complexe. C’est pour cette raison que les grandes envolées humanistes des associations, élus ou même, plus récemment, d’une chambre consulaire m’inspirent bien peu de considération eu égard au travail quotidien de nos équipes engagées et pleinement mobilisées dans leur mission de service public. »
Finis les sempiternels renvois de responsabilités ? Le Département n’a eu de cesse de renvoyer la balle dans le camp de l’État, prétextant un manque de moyens pour faire face à l’afflux de jeunes étrangers, quand l’État oppose de son côté à ces jeunes un manque d’intégration pour leur délivrer un titre de séjour. « Comment voulez-vous qu’ils s’intègrent, qu’ils étudient correctement s’ils ne sont pas logés ? », interpelle une militante.
« Cette dotation n’est donc qu’une participation de l’État »
Ce n’est pas gagné. Le budget consacré aux mineurs non accompagnés a en quelques années été multiplié par quatre pour atteindre 14,2 millions d’euros. Insuffisant rétorquent les associations, quand bien même l’État a mis la main à la poche en attribuant une dotation de 7 millions d’euros, la plus importante de France.
« La dotation de l’État finance 12 000 euros par nouveau jeune accueilli dans le dispositif de protection de l’enfance, explique Sandrine Martin-Grand. Le coût moyen par jeune est de 40 000 euros par an et nous les accueillons souvent plus d’un an. Cette dotation n’est donc qu’une participation de l’État et est très loin de couvrir l’ensemble des dépenses engagées par le Département. »
Insuffisant car, pour le Département, les besoins ne sont pas que financiers. « Nous manquons toujours de places d’accueil, et surtout d’outils adaptés pour mieux évaluer ces jeunes, comme par exemple la prise d’empreintes systématique à l’arrivée et un fichier national qui nous permettrait de nous assurer que ces jeunes n’ont pas déjà été évalués dans un autre département, ce qui arrive souvent. »
Bref, tout est encore très loin d’être réglé. L’idée d’un accueil partagé entre l’État et le Département ? Il n’est pas encore mis en place. Pas plus que l’intégration des étrangers dans la garantie jeunes, ce qui permettrait de leur faire bénéficier d’une formation dès l’âge de 17 ans.
« Ce n’est pas un problème de moyens, c’est un problème clairement politique, pointe Stéphane Dezalay pour la Cimade. La seule logique est électorale. Même les élus de la minorité sont entravés ! Ils ne leur laissent pas la possibilité d’aller chercher les statistiques dans les services ! ».
Vendredi, les élus de l’intergroupe de gauche entendaient déposer un vœu devant l’assemblée départementale. Vœu dans lequel ils réclamaient que le Département s’engage à réadapter les dispositifs existants pour accompagner les jeunes sortis de l’aide sociale à l’enfance, comme le permet le code de l’action sociale. Celui-ci prévoit en effet, un an avant la sortie du dispositif, un entretien avec chaque mineur accueilli.
Un vœu qui restera pieu, le groupe ayant essuyé le refus du président du conseil départemental Jean-Pierre Barbier de le présenter, comme de le soumettre au vote.
L’objectif était d’accompagner les jeunes vers l’autonomie, de leur éviter les ruptures de parcours et de ne pas reproduire ce qui s’était passé en juillet dernier.
Le Département rappelé à l’ordre par le Conseil d’État puis le tribunal administratif
Cet été, trente-deux jeunes, sortis du dispositif d’aide à l’enfance car considérés comme majeurs, s’étaient brutalement retrouvés à la rue, sans solution d’hébergement, ni de formation. Avant que le juge ne soit saisi et que le tribunal administratif de Grenoble n’ordonne au Département de suspendre les décisions de refus de contrat jeune majeur l’obligeant à réhéberger les jeunes dans leurs familles d’accueil et réexaminer leurs situations.
Le 25 août 2017, le Conseil d’État avait déjà rappelé le Département à l’ordre et à ses obligations de prise en charge inconditionnelle des mineurs, balayant alors les arguments financiers invoqués par Jean-Pierre Barbier. Le budget du Département s’élève à 1,5 milliard d’euros.
Patricia Cerinsek
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* Les associations Apardap – CIIP, La Cimade, CSRA, Diaconat protestant, Secours catholique, Institut des droits de l’Homme, La Rencontre, Ligue des droits de l’Homme, RESF 38, Un toit pour tous, 3aMIE et les syndicats FSU Isère, CGT Educ Action, CGT Isère, CGT Multi-profession des travailleurs sans papiers.
Auteur: Région Auvergne Rhône-Alpes
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