Pour l’avenir de Mayotte, l’Etat promet toujours plus d’inégalités
Alors que la colère gronde à Mayotte et que les revendications se font plus pressantes que ...
S’il y a bien des territoires qui ne sont pas épargnés par cette pandémie meurtrière mais complètement délaissés par le gouvernement, ce sont les Outre mer. Depuis maintenant plusieurs semaines, les victimes se comptent par centaines et les moyens alloués à ces départements dans la lutte contre le virus Covid19 sont largement insuffisants. À Mayotte, la situation sanitaire à laquelle s’ajoutent de graves problèmes socio-économiques fait craindre le pire.
Les pouvoirs publics ont imposé le 17 mars des mesures strictes dont le confinement sur tout le territoire national. Mais dans le département le plus pauvre de l’Union Européenne, où 84% de la population vit sous le seuil de pauvreté, ⅓ de la population n’a pas accès à l’eau courante, 40% des logements sont en tôle, comment peut-on exiger le respect de ces consignes ?
La Cimade s’inquiète et souhaite alerter du drame humanitaire qui s’y joue dans la plus grande indifférence.
Pour cette population déjà très précarisée, les difficultés quotidiennes s’accumulent suite aux mesures imposées pour lutter contre la propagation du virus Covid19. L’économie informelle, telle que la vente de fruits et légumes à la sauvette, qui permettait à de nombreuses personnes de subvenir à leurs besoins est désormais interdite, sans qu’aucune alternative ne soit proposée aux plus démunis. Les seuls points d’approvisionnement autorisés sont les supermarchés et grandes surfaces, avec leurs produits importés, chers et largement inaccessibles.
Depuis la fermeture des écoles, les enfants de tout âge sont désormais privés de la collation scolaire, qui pour beaucoup constituait leur seul repas journalier. Aujourd’hui, ils ont faim. Les professeurs en témoignent et alertent leur hiérarchie.
Outre l’insécurité alimentaire se pose le problème du manque d’infrastructures sanitaires : un désert médical angoissant.
Selon le Défenseur des droits, à Mayotte on compte 1,6 lits pour 1000 habitants contre 6 en métropole. En cas de contamination, la prise en charge des patients n’est pas pour autant assurée. L’offre libérale étant très peu développée, c’est le Centre Hospitalier de Mayotte qui fournit l’essentiel de l’offre de soins sur l’île. Seuls 16 lits de réanimation seraient disponibles pour toute l’île. D’autant que l’épidémie de dengue, portée au stade 4, sévit sans pouvoir être freinée depuis plusieurs mois (des milliers de cas dont 2495 cas confirmés) et a endeuillé de nombreuses familles.
En matière de prévention, La Cimade déplore que les mesures soient inadaptées aux réalités locales. Tant les attestations de déplacement que les campagnes de sensibilisation n’ont pas été repensées pour le territoire : absence de concertation avec les autorités locales (chefs de village, cadis, foundis…), de moyens d’impression, de traduction… Et comment parler du respect des gestes barrière quand l’accès à l’eau courante est impossible pour 30% de la population ?
La Cimade rappelle que toute la population est concernée par ce virus: français, étrangers, noirs, blancs, personnes âgées, enfants. Il en va de la responsabilité de l’État d’agir et de protéger tous les habitants du département. Les mesures imposées dans la lutte contre la propagation du virus ne doivent pas se faire au détriment des populations les plus démunies – l’accès à l’eau, la sécurité alimentaire, la sensibilisation aux gestes barrières, l’accès à la santé doivent plus que jamais être garantis à toutes et tous afin d’éviter une catastrophe annoncée.
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Auteur: Région Outre-Mer