Pour l’avenir de Mayotte, l’Etat promet toujours plus d’inégalités
Alors que la colère gronde à Mayotte et que les revendications se font plus pressantes que ...
Le 10 janvier dernier, plus de 80 étudiant·e·s scolarisé·e·s dans différents établissements de l’île ou déscolarisé·e·s depuis peu organisaient une manifestation devant le tribunal judiciaire de Mayotte. L’objet : dénoncer avec force les conséquences de la réforme du droit du sol les empêchant d’accéder à la nationalité française et l’impossibilité de poursuivre leurs études supérieures après le bac, faute d’accès au service de la préfecture dans un délai raisonnable
Une « double peine » que La Cimade dénonce depuis des années et imposée à des milliers de jeunes né·e·s et ayant grandi à Mayotte pour lesquel·le·s l’accès à la nationalité est devenu impossible, faute d’apporter la preuve d’une régularité de séjour de l’un de leurs parents depuis cinq ans sur le territoire. N’ayant d’autre choix que de solliciter un titre de séjour à la préfecture, ces dernier·ère·s se retrouvent alors confronté·e·s au même parcours du combattant que l’ensemble des personnes en démarche de régularisation : des délais d’attente interminables, souvent de plusieurs années, pour obtenir un premier rendez-vous à la préfecture, exacerbés par la dématérialisation des procédures de prise de rendez-vous en ligne.
« Aujourd’hui, nous aimerions être entendu·e·s : la loi qui est mise en place nous pénalise, nous qui ne demandons qu’à poursuivre nos études. Elle favorise l’inégalité des droits et induit une forme de discrimination en fonction des origines, ce qui selon nous est contraire à la Convention internationale relative aux droits de l’enfant et à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Quand la nationalité nous est refusée, on nous dit d’aller à la préfecture mais encore faudrait-il pouvoir obtenir un rendez-vous » déplore Sabrina*, l’une des représentantes et porte-parole du mouvement étudiant·e·s « Nous demandons à pouvoir poursuivre nos études supérieures sans entraves et sans conditions de statut administratif et nous demandons les mêmes droits que partout en France. L’état nous a-t-il oublié·e·s ? C’est la question que l’on se pose. »
Face à ces revendications, la seule réponse apportée par l’administration a été celle de la force : les manifestant·e·s ont à plusieurs reprises fait l’objet d’interpellations policières honteuses et le mouvement dénonce les placements en rétention administrative dont les étudiant·e·s font l’objet au quotidien en toute illégalité, bien qu’ils et elles soient protégé·e·s par la loi contre une mesure d’éloignement du fait de leur résidence ininterrompue sur le territoire depuis leur naissance. « Le jour de la manifestation, sept de nos camarades ont été interpellé·e·s par la police aux frontières (PAF) et amené·e·s s directement au CRA. Nous dénonçons ces arrestations qui ont pour objet de nous dissuader de manifester et nous faire taire » précise Sabrina.
Face à l’absence de réponse des autorités, la mobilisation étudiante se poursuit et une nouvelle manifestation a été organisée le 7 février dernier, elle aussi entravée par les forces de police. Ayant tenté cette fois de rejoindre la préfecture pour revendiquer l’accès au service public pour toutes et tous dans un délai raisonnable et la délivrance d’un titre de séjour leur permettant de poursuivre leurs études, les manifestantes et manifestants ont été menacé·e·s d’interpellations massives par la police les enjoignant à rebrousser chemin. Deux manifestants feront l’objet de contrôles et seront placés en rétention la même journée, et libérés le lendemain par la préfecture.
Même chose jeudi 9 février dernier, où invité·e·s sur le plateau du média Kwézi TV, deux personnes de la délégation étudiante seront interpellées dès la sortie de l’interview. « En sortant du plateau, deux de nos camarades se sont fait interpeller par la PAF, trouvez-vous cela en accord avec les valeurs et les droits défendus par la République française ? » déplore le collectif.
Face aux atteintes portées à leurs droits et notamment à celui de manifester, le mouvement étudiant entend poursuivre la mobilisation et continuer à interpeller les pouvoirs publics pour faire entendre ses revendications.
« Nous sommes convaincu·e·s que notre génération mérite un avenir meilleur, avec des opportunités égales pour tous·tes, quelle que soit notre origine » précise le mouvement étudiant dans un courrier adressé au Préfet en vue d’obtenir l’autorisation d’organiser une nouvelle manifestation dans les prochains jours.
La Cimade s’associe aux revendications du mouvement étudiant des jeunes né·e·s en France et demande aux autorités :
Auteur: La Cimade Océan Indien