Inlassablement, les préfectures de Guyane et de Guadeloupe continuent les expulsions vers Haïti
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Paul* est père d’un enfant de 12 ans qui est né et a grandi toute sa vie à Saint Martin. La mère de son fils, de nationalité Jamaïcaine, est en situation régulière. Paul a été interpellé à Saint Martin puis a été transféré au centre de rétention de Guadeloupe . Cela fait bientôt 30 jours qu’il s’y trouve et qu’il est séparé de sa famille.
Aujourd’hui, Paul a souhaité s’exprimer sur ses conditions d’enfermement, son quotidien, ses ressentis et son sentiment d’injustice qui grandit.
« Les conditions sanitaires sont terribles. L’odeur est très mauvaise. Il n’y a rien pour nettoyer les salles de bain ou les chambres. Ça sent l’humidité partout.
Ici ce n’est pas fait pour des humains. Nous n’avons aucune liberté. On ne peut pas manger ou fumer quand on en a envie. Il faut attendre qu’un policier se décide à nous donner à manger ou à nous ouvrir la cour. Parfois cela prend beaucoup de temps.
Nous n’avons pas accès à la cour comme nous le voulons, nous sommes enfermés toute la journée, les policiers nous ouvrent parfois la cour pour fumer une cigarette mais ils nous pressent pour que ça ne dure pas longtemps.
La nourriture n’est pas bonne. Nous avons besoin de demander aux policiers à chaque fois que nous voulons de l’eau alors qu’il fait très chaud. Les policiers viennent quand ils veulent, nous attendons parfois longtemps pour avoir de l’eau**.
C’est pire qu’une prison. En prison, il y a une part de liberté. Il y a des choses à faire. Ici nous n’avons rien à faire, nous nous ennuyons, nous sommes confus, cela nous créé de l’anxiété. Je n’ai rien à faire, je reste allongé dans le couloir près des fenêtres toute la journée. J’ai installé mon matelas à cet endroit parce que ça sent un peu moins mauvais. Je reste allongé toute la journée à attendre que le temps passe. Je ne sais pas quand je vais être expulsé.
Nous n’avons le droit à rien ici, les seules choses que nous pouvons acheter ce sont des cigarettes, du McDonalds, du KFC et du jus. C’est tout ce que nous pouvons nous procurer. Nous ne pouvons pas avoir accès à du matériel pour nettoyer les chambres par exemple.
Les salles de bain sont dégoutantes, c’est nettoyé une fois par semaine. Nous ne pouvons même pas dormir dans les chambres à cause de l’odeur, donc nous dormons dans le hall, car dans les chambres il y a l’odeur, des moustiques et des fourmis.
Nous avons un grand sentiment d’injustice.
Je ne parle pas français, je n’ai pas d’interprète au centre de rétention. C’est difficile de communiquer.
Devant le juge j’ai eu un interprète mais même l’avocat ne me connaissait pas et n’a pas essayé de communiquer avec moi et personne ne parlait anglais. L’interprète ne traduisait pas ce que je disais mais faisait des raccourcis. Ce n’est pas juste. Je ne peux pas me défendre à cause de la langue. Je ne peux pas dire ce dont j’ai besoin. On n’a pas de droit.
Je me sens comme un criminel. On est traité comme des criminels. J’ai le sentiment que ne pas avoir de papier c’est pire que de commettre un crime. Je suis traité pire.
Je ne mange plus, je ne dors plus.
Le centre n’est pas bon pour les humains. C’est contraire à nos droits. C’est pire que la prison. »
* le prénom a été modifié
**les personnes retenues disposent d’un robinet d’eau dans leur chambre à côté des toilettes mais ne préfèrent pas la consommer.
La Cimade publie les témoignages des personnes qu’elle accompagne, en particulier dans les centres de rétention. Une parole libre d’une personne enfermée. Une parole qui permet de saisir les conséquences des politiques à l’égard des personnes en migration. Des textes, des extraits sonores ou des vidéos recueillis par les intervenant·e·s de La Cimade.
Auteur: Région Outre-Mer
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