Migrant’Scène bat son plein! Par-delà les montagnes et les frontières, tissons des liens entre les peuples !
Migrant.es d’ici et d’ailleurs, exilé.es victimes des guerres, de la misère et de catastrophes ...
La Cimade œuvre depuis 2008 à Mayotte aux côtés de toutes les personnes opprimées et dénonce aujourd’hui l’opération Wuambushu. Non seulement elle ne réglera pas les difficultés auxquelles tou.te.s les habitant.e.s sont confronté.e.s, mais elle va aggraver la précarité de la population et exacerber les tensions sociales qu’elle prétend combattre.
Mayotte se sent abandonnée et la population hurle son désarroi. Si la violence dénoncée par les habitant.e.s est bien réelle, l’Etat se focalise sur une réponse répressive vaine et préjudiciable ; sans formuler de réponses globales suffisantes face à l’ensemble des besoins pourtant criants dans le 101e département français, aux défaillances structurelles du service public pour favoriser l’accès aux soins et à l’éducation, pour assurer une distribution d’eau potable satisfaisante, pour garantir l’inclusion de toutes et tous. Face aux besoins de résorption de l’habitat insalubre et d’accès à un logement digne, il déploie des tractopelles et jette des familles à la rue.
A Mayotte plus encore qu’ailleurs, l’immigration est présentée comme responsable de tous les maux et sert de justification à un régime particulièrement attentatoire aux droits et à la dignité humaine. Elle détourne le regard des véritables enjeux structurels du territoire, nourrit l’amalgame entre insécurité, délinquance et immigration et a conduit au déploiement d’une opération policière et militaire qui porte à son paroxysme l’enlisement de l’Etat dans une spirale sécuritaire et répressive. Elle attise la violence qu’elle prétend combattre et n’a pas sa place dans un Etat de droit.
Ainsi, alors que cette opération prévoit d’augmenter de façon exponentielle le rythme des reconduites à la frontière, La Cimade exprime sa plus vive inquiétude. L’année passée, ce sont déjà 27 643 personnes qui ont été enfermées à Mayotte dont 2905 enfants[1]. L’empressement avec lequel sont réalisés ces éloignements rend impossible l’exercice des droits des personnes pourtant protégées contre une expulsion en l’absence de recours effectifs aux tribunaux. L’opération Wuambushu risque de renforcer les pratiques illégales visant à éloigner sans ménagement des mineurs isolés, malgré la condamnation de l’Etat par la Cour Européenne des Droits de l’Homme [2] pour ses pratiques de rattachements arbitraires d’enfants à des adultes tiers en vue de leur expulsion. Si la machine s’est enrayée la semaine dernière avec le refus de réadmission des personnes expulsées vers l’Union des Comores, et si ces dernières, replacées en rétention administrative par la préfecture, ont toutes été libérées par le juge des libertés et de la détention en raison de l’illégalité de cette procédure, il est à craindre dans les jours à venir que l’emballement qui accompagnera la reprise de la politique du chiffre des éloignements, la rende incontrôlable et porteuse de nombreuses violations des droits. Inquiétudes confirmées notamment à travers la récente ordonnance rendue par le juge des référés du Tribunal administratif de Mayotte en date du 29 avril 2023, sur la création de locaux de rétention administratives temporaires dont le but est d’éloigner toujours plus avec le moins d’accès aux droits possible. Le Tribunal y confirme que « les conditions de rétention dans les locaux de rétention administratives régulièrement créés par le préfet de Mayotte (…) ne permettent pas aux personnes retenues de contester utilement leur éloignement et leur rétention administrative et portent ainsi une atteinte grave et manifestement illégale au droit d’exercer un recours effectifs devant une juridiction », enjoignant ainsi le préfet, sous astreinte, de cesser la violation des droits fondamentaux des personnes retenues[3].
Alors que plane sur la fin d’année le spectre d’un nouveau projet de loi asile et immigration et d’une réforme prévoyant à Mayotte une nouvelle offensive contre l’accès à la nationalité française, l’arsenal répressif poursuit son avancée inexorable, écrasant sur son passage les espoirs d’une vie meilleure pour les habitant.es de Mayotte.
La Cimade appelle :
[1] Rapport national et local 2022, avril 2023, Centres et locaux de rétention administrative
[2] Cour eur. D.H., 25 juin 2020, Moustahi c. France, req. n° 9347/14, https://hudoc.echr.coe.int/fre#{%22itemid%22:[%22002-12876%22]}
[3] Tribunal administratif de Mayotte, 29 avril 2023, ordonnance n° 2302123
Auteur: Service communication
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