ACTUELLEMENT
À l’heure actuelle, seules les personnes dont la demande d’asile est en cours d’examen depuis plus de 6 mois peuvent solliciter une autorisation de travail. Les personnes déboutées qui ont fait un recours ou les personnes dublinées (censées déposer leur demande dans un autre pays européen) sont exclues de cette procédure. Résultat, en 2021, à peine 2,3 % des personnes ayant déposé une demande d’asile étaient autorisées à travailler.
QUE PROPOSE LE PROJET DE LOI ASILE ET IMMIGRATION ?
Le projet de loi prévoit d’autoriser à travailler les ressortissant∙e∙s de certains pays dès l’introduction de leur demande d’asile. La liste de ces pays sera fixée sur la base du taux de protections accordées à leurs ressortissant∙e∙s l’année précédente, vraisemblablement un taux d’accord supérieur à 50 % en première instance (ce qui ne prend pas en compte les protections obtenues après un recours).
ANALYSE DE LA CIMADE
Certes cette mesure ouvrirait le marché du travail à un plus grand nombre de personnes demandant l’asile. Elle reste néanmoins très discriminatoire puisque fondée sur un critère de nationalité qui ne préjuge pas de l’issue de leur demande, et non conforme avec le droit de l’Union européenne qui exige que les personnes dublinées aient le droit de travailler. Ce projet de loi, maintient donc dans la précarité l’immense majorité des personnes demandant l’asile.
DANS LA VRAIE VIE
Fareng N. est iranienne. Incarcérée et torturée par la police suite à sa participation aux manifestations contre le régime en place, elle a fui l’Iran à sa sortie de prison et réussi à rejoindre des proches installés en France. Si le projet de loi était adopté en l’état, le dépôt de sa demande d’asile ne s’accompagnerait pas du droit de travailler car l’an passé, moins de 50 % de ses concitoyen·n·es ont obtenu l’asile en France. Fareng n’a pas la bonne nationalité. Zahar R. et Sharbat S. sont afghanes et travaillaient dans le même laboratoire de recherche. La prise du pouvoir par les talibans les prive de tous leurs droits et de leur emploi. Elles décident de chercher l’asile en France mais les hasards de la route les séparent. Zahar parvient à rejoindre la France sans avoir été contrôlée dans les pays européens qu’elle a traversés. Si le projet de loi était adopté en l’état, elle obtiendrait automatiquement le droit de travailler au dépôt de sa demande d’asile car l’an passé plus de 50 % de ses concitoyen·n·es ont obtenu l’asile en France. Zahar a la bonne nationalité. Quant à Sharbat, avant d’arriver en France, elle a été arrêtée par la police aux frontières bulgares qui a prélevé et transmis ses empreintes à la base de données EURODAC. Elle entre ainsi dans le « régime Dublin » qui voudrait qu’elle fasse sa demande d’asile en Bulgarie. Le projet de loi adopté en l’état ne changerait rien à sa situation. En déposant une demande d’asile en France, non seulement, elle n’obtiendrait pas le droit de travailler mais elle pourrait être expulsée vers la Bulgarie. Sharbat a bien la bonne nationalité mais pas le bon statut.
Dans ce contexte, La Cimade demande que la France se mette en conformité avec les dispositions de la directive européenne sur l’accueil qui exigent que l’ensemble des personnes demandant l’asile aient accès au marché du travail dès l’enregistrement de leur demande.