PAU : LA CIMADE ET SES PARTENAIRES DENONCENT LES CONDITIONS D’ACCUEIL INDIGNES DES PERSONNES EN DEMANDE D’ASILE
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Témoignage d’une bénévole de la Cimade ayant assisté aux audiences du Juge des libertés et de la détention du 25/12/2019
Un jour de Noël pas comme les autres
Ce 25 décembre 2019 à Toulouse, la ville se réveille sous le soleil et s’étire paresseusement. Les rues sont vides, tous les magasins et toutes les administrations sont fermés, respectant cette trêve annuelle. Tous ? Non…. Un petit carré d’irréductibles s’obstine à maintenir un guichet ouvert. Qui sont-ils ?
Le palais de justice semblait désert à 13h30, mais voici qu’un car de police de la PAF s’arrête près des grilles fermées, et oui, un vigile est là pour faire entrer à la queue leu leu sept personnes menottées les mains dans le dos, encadrées par une douzaine de policiers. Elles sont conduites à travers le grand hall vide vers la salle d’audience où va se tenir une séance exceptionnelle, mobilisant un juge, son assesseur, des avocats ainsi qu’un représentant de la préfecture. Quel crime ont donc commis ces personnes pour justifier d’une telle mobilisation un jour de fête ? Il faut croire qu’ils menacent gravement la sécurité publique ? En réalité, ce sont des personnes en situation irrégulière qui ont eu le malheur d’avoir un contrôle d’identité le 23 décembre : sans papiers, comme ils faisaient l’objet d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF), la police les a placés illico au centre de rétention de Cornebarrieu, en attente d’une expulsion vers leur pays d’origine. Mais la loi stipule que le juge des libertés et de la détention (JLD) doit statuer sur leur maintien en détention dans les 48 heures. D’où cette séance ahurissante.
Ce 25 décembre, juges, avocats, policiers et retenus ne sont pas seuls. Dans la salle se pressent de nombreux membres du Cercle des Voisins et de la Cimade, venus assister à l’audience bien particulière. Sans aucun droit de parler, mais avec le droit d’écouter pour pouvoir témoigner ensuite de la façon dont notre pays (mal)traite ainsi chaque jour ces citoyens du monde. Bien que silencieuse, la masse des témoins présents rend la juge légèrement nerveuse. A la première comparution, l’avocat fait état d’un problème. Au centre de rétention, les personnes sont censées pouvoir consulter à tout moment l’Office Français de l’Immigration et de l’Intégration (OFII) qui est notamment responsable de l’aide matérielle fournie aux retenus. La convention entre l’OFII et le centre de rétention, produite par l’avocat, indique bien que cette présence doit être assurée tous les jours de l’année. Or, c’est la trêve de Noël, non ? L’OFII a fait savoir au centre que du 23 au 26 décembre, sa présence ne serait pas assurée…
Cette absence rendrait-elle la rétention du 23 au 25 décembre illégale ? La juge semble un peu déstabilisée, ce premier retenu avait manifestement besoin de l’OFII. Mais à partir de la deuxième comparution, devant le même argument évoqué par les avocats, elle se reprend, et demande systématique à chaque retenu : « Avez-vous fait appel à l’OFII ? », comme si une réponse négative changeait quoique ce soit à l’absence de cet organisme. Sommé de répondre à l’argument des avocats, le représentant de la préfecture déclare alors « L’absence de l’OFII n’est pas un problème, les retenus peuvent toujours faire appel au Cercle des Voisins ou à la Cimade… ». C’est un comble : ce serait donc aux associations de venir pallier aux carences de l’Etat et ainsi lui permettre de continuer à enfermer les sans papier ? Une houle de surprise parcourt l’auditoire…on se regarde, on soupire ! Pas un mot, mais la juge en profite pour hausser le ton : « Silence, ou je fais évacuer la salle ! ». L’audience se poursuivra jusqu’au bout, et après une courte interruption de séance, le verdict tombe : la détention est prolongée (de 28 jours) pour tous les 7 retenus, quelle que soit leur situation.
Pourtant l’histoire ne s’arrête pas là, car deux jours plus tard, les retenus comparaissent à nouveau devant la cour d’appel pour contester cette décision. Et là, l’argument de la carence de l’OFII pendant la rétention est repris et entendu par les juges de la Cour d’appel, qui décide de libérer tous les retenus.
Quelle ironie ! Toute cette mobilisation de fonctionnaires pendant un jour férié pour s’assurer que l’enfermement ne souffre aucune trêve, même à Noël, n’aura finalement servi à rien, à part traumatiser encore plus ceux qui auront subi l’interpellation et la rétention.
Finalement, à irréductibles, irréductibles et demi ! Non, nous ne nous résignons pas à voir enfermer tous les jours ces migrants comme des criminels, à les voir arriver tous les 30 jours, menottés, au tribunal où leur rétention est presque invariablement prolongée jusqu’à 90 jours maximum. Toute la Gaule devient-elle donc occupée par des dispositifs policiers de plus en plus liberticides ? Non, …. un petit village d’irréductibles résiste encore et s’agrandit: autour du Cercle des Voisins, de la Cimade et d’autres associations, nous sommes de plus en plus nombreux à ne pas accepter cette dérive soit-disant sécuritaire de notre société.
Auteur: Région Sud-Ouest
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