PAU : LA CIMADE ET SES PARTENAIRES DENONCENT LES CONDITIONS D’ACCUEIL INDIGNES DES PERSONNES EN DEMANDE D’ASILE
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Publication de la loi permettant de nouveau et de façon massive la rétention des personnes Dublinées. Explication.
Après l’arrêt de la Cour de cassation du 27 septembre 2017 qui a considéré que la rétention des personnes Dublinées n’était pas applicable, faute d’une définition par loi du risque de fuite, le Gouvernement n’a pas tardé à réagir en demandant aux groupe les constructifs de déposer une proposition de loi. Après une adoption à l’Assemblée le 7 décembre et un durcissement au Sénat, la proposition a été définitivement adoptée en deuxième lecture le 15 février par l’Assemblée et a été publiée au journal officiel après une décision de conformité du Conseil Constitutionnel le 15 mars. Elle va conduire à un usage massif de la rétention pour ces personnes y compris une rétention sans décision d’éloignement pendant la période de détermination et de saisine .
La loi relative à la bonne application du régime d’asile européen prévoit donc qu’une personne qui fait l’objet d’une procédure selon le règlement Dublin peut être placée en rétention après un examen individuel et en tenant compte de sa vulnérabilité s’il existe risque non négligeable de fuite, risque qui est présumé dans les cas suivants :
Avec une telle liste, il est clair que la plupart des personnes Dublinées pourront être enfermées en rétention, même si la loi prévoit que cela n’est possible que si une saisine des autorités de l’Etat-membre a été faite (dans un délai ne pouvant excéder trois mois après la présentation dans les structures de premier accueil) et que les familles ne le soient qu’après une décision de transfert et pour une brève durée. Un décret devra également permettre de signaler des vulnérabilités.
Véritable revirement dans la philosophie de la rétention, et jusqu’à présent limitée aux préfectures du littoral, la loi permet de placer en rétention une personne Dublinée, pendant toute la procédure de saisine(s) et sans qu’aucune mesure d’éloignement soit prise . Cela légalise une pratique courante dans certains centres de rétention (Coquelles, Rennes) et après que le Conseil d’État en juillet puis de nouveau en mars et la Cour de cassation le 7 février ont, de conserve, considéré que cela n’était pas possible. Sachant que le règlement prévoit qu’en cas de rétention, la saisine se fait dans un délai d’un mois, la réponse dans un délai de quinze jours et le transfert en six semaines, et que le projet de loi Collomb prévoit une durée de rétention de 60 jours pour les personnes Dublinées (avec trois fois quinze jours supplémentaires en cas d’obstruction), on pourrait voir des personnes séjourner pendant des semaines dans les CRA sans aucune décision d’éloignement alors que cette privation de liberté n’était prévue jusqu’alors que pendant le temps strictement nécessaire à l’exécution d’une décision d’expulsion.
La loi prévoit également que si une personne retenue demande asile et que sa demande relève de Dublin , le préfet n’aura pas à prendre une décision de maintien en rétention, pourtant rendue obligatoire par le droit européen.
Pour permettre le placement en rétention, la loi prévoit un remplacement de l’assignation au titre de l’article L. 742-2 du CESEDA (pendant six mois renouvelable) par celle au titre de l’article L. 561-2 du CESEDA (pendant 180 jours). Le. Le seul avantage que l’on peut y trouver est que l’assignation à résidence L. 561-2 du CESEDA est contestable en recours urgent devant le TA qui peut donc examiner à chaque renouvellement des moyens contre la procédure de détermination et de saisine (notamment si la personne peut invoquer des liens en France). La loi prévoit que si une décision de transfert est prise après le début d’une assignation à résidence, le juge statue dans les soixante-douze heures à compter de la notification de l’assignation.
Enfin le Sénat en a profité pour réduire le délai de recours contre les décisions de transfert à sept jours au lieu de quinze. Il s’agit des recours formés alors que la personne n’est ni assignée, ni retenue. Pour réduire encore le délai à quarante huit heures, les préfets ont massivement utilisé l’assignation à résidence et la rétention. Ainsi en 2017 , selon des données du Conseil d’Etat, 60% des 9 000 recours contre des décisions de transfert ont été formulés dans un délai de quarante huit heures alors qu’en 2016, cette part était de 21% pour 2 600 recours.
La loi a été présentée comme réparant une faille juridique mais les préfectures n’ont jamais cessé de placer en rétention des personnes Dublinées alors même qu’elles n’en avaient plus le droit.
Entre le 28 septembre 2017 et le 19 mars 2018, dans les seuls centres où la Cimade exerce la mission d’aide à l’exercice des droits, au moins 451 personnes dont 60 enfants ont été placées en rétention pour l’exécution d’une décision de transfert et au moins 171 ( dont 15 enfants) ont été transférées vers un autre État Dublin. Pour contourner les décisions des juridictions suprêmes, les préfets ont placé les personnes le soir pour un vol dès potron-minet, les empêchant de saisir les juges. 85% des personnes ont ainsi été placées pendant un ou deux jours. Dans d’autres lieux, ce sont les juges des libertés et de la détention qui ont prolongé la rétention sous prétexte que les personnes étaient en fuite . Les tribunaux administratifs de Melun et de Montreuil ont enjoint au préfet de mettre fin à la rétention de personnes pour qui la procédure Dublin était éteinte
Photographie : Centre de rétention administrative du Mesnil-Amelot, novembre 2017. © Yann Castanier / Hans Lucas
Auteur: Responsable national Asile
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