PAU : LA CIMADE ET SES PARTENAIRES DENONCENT LES CONDITIONS D’ACCUEIL INDIGNES DES PERSONNES EN DEMANDE D’ASILE
LES PRAHDA (programmes régionaux d'accueil et d'hébergement des demandeurs d'asile) font partie ...
Mohamed a grandi en France dans l’Hérault puis en Ariège. Du jour au lendemain tout a basculé quand il a été expulsé au Maroc à l’âge de 31 ans. Il n’a eu d’autre choix que de reprendre la route de l’exil pour revenir en France.
« Je m’appelle Mohamed Rachidi. Je suis né le 31 décembre 1985 à Rissani au Maroc mais je suis arrivé en France en 2000 à l’âge de 14 ans.
J’ai fait toute ma scolarité à Montpellier et puis je suis parti vivre en Ariège. A Pamiers.
En 2016, j’ai été arrêté et envoyé au centre de rétention de Toulouse. Ils m’ont expulsé au Maroc du jour au lendemain mais je ne pouvais pas refaire ma vie ailleurs qu’en France où j’avais vécu depuis tant de temps.
Je n’ai pas eu d’autre choix que de tenter de revenir en France. Voilà ce qui s’est passé à Edirne en Turquie dans le village de Bosna à la frontière gréco-turque alors que nous essayons de rentrer en Europe. On s’est fait tirer dessus moi et mon ami. Il a été touché par balle. J’ai réussi à m’échapper mais mon ami a été touché de deux balles dans le bras. Il est tombé à terre et les policiers sont venus le récupérer et ils l’ont amené à l’hôpital.
Mon ami est en danger et il souffre énormément. Il ne peut même pas se faire soigner correctement car il n’a pas de papier turc. Il a fait transférer son dossier à l’hôpital d’Istanbul mais ils refusent de le soigner. Nous n’avons plus d’argent. On se retrouve à errer dans la rue à chercher des petits boulots pour survivre. Mon ami ne peut pas travailler donc c’est moi qui travaille de temps en temps, mal payé et parfois même pas du tout.
Une fois j’ai réussi à passer la frontière. Je me suis fait attraper du côté grec par les policiers. Ils nous ont traité comme des moins-que-rien en disant tu es Muslim Muslim. Ils nous ont craché dessus et après ils nous ont embarqués à bord d’un zodiac pour nous faire traverser la rivière qui sépare l’Europe de la Turquie. C’étaient des policiers cagoulés grecs. Ils nous ont frappé à plusieurs reprises alors qu’on était mouillés et qu’on tremblait de froid d’avoir traversé les Trois Rivières à la nage.
Il faut faire quelque chose pour nous. Nous ne pouvons plus rester ici coincés. On a perdu nos passeports en Grèce et du coup, on n’est pas en règle pour les turcs car nous n’avons plus de passeport ou de carte d’identité. Nous risquons de nous retrouver en prison car sans passeport on se retrouve clandestins en Turquie.
Merci de bien dire tout ça. Je m’appelle Rachidi Mohamed né le 31 décembre 1985 à Rissani au Maroc et ma maison c’est à Pamiers. »
La frontière gréco-turque : une vieille histoire de refoulements
Les violations des droits des personnes étrangères à la frontière entre la Turquie et la Grèce ne datent malheureusement pas d’aujourd’hui. Déjà en 2009, le réseau Migreurop évoquait cette frontière au nombre des « frontières assassines » dans l’un de ses rapports : contrôle, enfermement, refoulements, mise en danger des personnes exilées et mort de plusieurs d’entre elles étaient déjà des pratiques courantes.
L’Union européenne et ses membres ont déployé des efforts sans précédent à cette frontière pour rendre de plus en plus difficile l’accès au territoire européen : déploiement d’opérations de l’agence Frontex (voir à ce propos le rapport de 2014 d’EuroMed Droits, de la FIDH et Migreurop), arrangement entre l’UE et la Turquie en mars 2016 pour externaliser le contrôle des personnes exilées à son voisin, alors même que l’Etat de droit y est largement remis en cause depuis plusieurs années, financements à la Grèce pour renforcer la surveillance de sa frontière extérieure, création de hotspots sur les îles grecques, etc.
En Grèce, de nombreuses organisations de la société civile continuent de documenter les violences commises par les forces de l’ordre contre les personnes exilées. Dans un rapport publié en décembre 2018, trois ONG grecques dénonçaient ces violations en mettant en lumière le témoignage d’une quarantaine de personnes syriennes, afghanes, algériennes, turques, kurdes, égyptiennes, toutes refoulées violemment vers la Turquie au niveau du fleuve Evros. Avant d’être refoulées, certaines ont également été détenues en toute illégalité. Ces refoulements, en plus de mettre des personnes en exil gravement en danger – des dizaines ont perdu la vie en tentant de passer le fleuve – sont une violation directe au droit grec, européen et international. Malgré le refus des autorités grecques et européennes de reconnaître et mettre fin à ces pratiques, les ONG continuent à documenter la situation à cette frontière, comme ici dans une vidéo du Conseil grec des Réfugiés.
Auteur: Région Sud-Ouest
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