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Une justice d’exception est rendue dans le CRA du Mesnil-Amelot depuis un an

22 octobre 2014

Le tribunal de grande instance de Meaux a ouvert son annexe délocalisée dans le centre de rétention administrative (CRA) du Mesnil-Amelot le lundi 14 octobre 2013. La Cimade, soutenue par d’autres associations et organisations (Avocats pour la Défense des Droits des Étrangers, Conseil national des barreaux, GISTI, Ligue des droits de l’homme, Syndicat des avocats de France, Syndicat de la magistrature), s’était opposée dès le départ à cette délocalisation. Un an après, les craintes et les interrogations soulevées par La Cimade sont confirmées par les faits.

Le tribunal de grande instance de Meaux a ouvert son annexe délocalisée dans le centre de rétention administrative (CRA) du Mesnil-Amelot le lundi 14 octobre 2013. La Cimade, soutenue par d’autres associations et organisations (Avocats pour la Défense des Droits des Étrangers, Conseil national des barreaux, GISTI, Ligue des droits de l’homme, Syndicat des avocats de France, Syndicat de la magistrature), s’était opposée dès le départ à cette délocalisation. Un an après, les craintes et les interrogations soulevées par La Cimade sont confirmées par les faits.

Les audiences se déroulent dans l’enceinte même du complexe de bâtiments accolés au CRA relevant de la compétence du ministère de l’intérieur. Ce complexe architectural (sis rue de Paris au Mesnil-Amelot) comprend, outre l’annexe judiciaire (située au n°10), les deux centres de rétention administrative (n°2 et n°6), la Direction départementale de Seine-et-Marne de la police aux frontières (n°4) ainsi qu’une caserne d’une compagnie républicaine de sécurité (CRS, au n°8); le tout sur la même parcelle, entouré d’un unique grillage et à proximité immédiate des pistes de l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle.

L’atteinte à la publicité des débats

La justice est l’affaire de tous et chacun est en droit de demander raison. Le principe de la publicité est consubstantiel à l’œuvre de justice, car il assure le contrôle de la régularité dans l’application de la règle de droit, et de la loyauté dans la démarche du juge. Cette transparence n’en est que plus importante pour ceux qui souffrent et qui attendent, souvent dans l’angoisse, cet acte unique qu’est une décision du juge.
Depuis un an et malgré les annonces, aucune signalétique n’a été mise en place et la fréquence des bus ne s’est pas améliorée. Résultat : les familles sont très rarement présentes à l’audience alors qu’elles se déplacent sans peine à la cour d’appel de Paris ou au tribunal administratif de Melun.

L’apparence d’impartialité de la justice
L’omniprésence de la police aux frontières au sein de l’annexe judiciaire questionne le respect du  principe de l’apparence de justice. En effet, la justice ne doit pas seulement être rendue, mais on doit voir qu’elle a été rendue. Elle doit offrir des garanties suffisantes pour exclure tout soupçon malveillant sur son impartialité. L’apparence d’indépendance suppose que le tribunal soit identifié par le justiciable et le public comme un lieu de justice, ce que ne peut garantir une salle d’audience installée dans l’enceinte d’un centre de rétention.
Les policiers en charge de la surveillance de l’annexe sont les mêmes que ceux du CRA contrairement à tous les autres tribunaux qui sont surveillé par un personnel dédié. Et malgré les promesses, les escortes passent par l’intérieur du CRA pour se rendre au « tribunal » sans emprunter la rue de Paris. Les personnes enfermées sont ainsi maintenues dans une confusion liée à l’architecture et à l’organisation. Elles font régulièrement part aux intervenants de La Cimade du sentiment d’être jugé par la « justice de la police ».

L’instrumentalisation de l’office du juge par l’administration

Le juge est isolé dans un « tribunal » fait sur mesure pour l’administration. Le 23 octobre 2013, une délégation de hauts fonctionnaires du ministère de l’intérieur s’est permise de faire une visite inopinée sans en informer les magistrats, ni leur demander leur accord. Une liberté qu’ils ne se seraient pas accordée dans un Palais de justice.
Le 18 juillet, alors qu’une personne était convoquée au « tribunal », la police s’apprêtait à la faire embarquer sur le tarmac à Roissy. Le magistrat a ordonné le retour du justiciable pour son audition, mais le préfet de Seine-et-Marne a indiqué à la police de passer outre la demande de l’autorité judiciaire.

Les conditions matérielles

L’une de motivations affichée de la délocalisation était le « confort » du justiciable qui pourrait retourner dans sa chambre du CRA et faire usage de ses droits dans l’attente de la décision du juge. Il n’en est rien, les personnes attendent dans une sorte de dépôt, sans accès à l’extérieur, sans possibilité de fumer ni de téléphoner en raison de l’absence de couverture réseau. La porte des  toilettes a été retirée pour des « raisons de sécurité », les personnes sont donc contraintes de faire usage de ces toilettes avec un policier qui reste devant la porte, ce qui porte gravement atteinte à leur droit à la dignité.

Pour aller plus loin, télécharger la note sur La Cimade sur la délocalisation de la justice au CRA du Mesnil-Amelot.

Auteur: Service communication

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